L’affaire du décolleté

19 juillet 2010 0 Par Catnatt

 

Gottlieb, William P., 1917-, photographer.

La grande affaire du week-end… Non pas Woerth, pas la guerre dans le monde, vaguement l’histoire des journalistes otages en Iran (marrant que ça se réveille des mois plus tard), non, la grande affaire sur twitter de ce week-end, c’est le #décolleté.

 

Résumé : tout part d’un délire bon enfant et hop, faisons un concours de décolleté. Des femmes, des hommes balancent leurs photos. Le phénomène prend de l’ampleur. Tout le monde sent à plein nez le mini-buzz alors surtout ne réfléchissons pas, allons-y gaiement.

 

Jusqu’au moment où Babillages alias xoxobcapucine s’inscrit en faux. Je cite « Le concours #décolleté c’est pour les neo-salopes 2.0 en quête de followers c’est ça ? »

 

Décortiquons l’histoire : J’aime pas trop « neo-salopes 2.0 », c’est assez réducteur. Mais souvenons-nous qu’au final « salope », c’est aussi une expression. Par exemple et tout à fait au hasard (!!!) « le manifeste des 343 salopes » qui avait fait un joli buzz à l’époque… (Le manifeste de celles qui assumaient d’avoir eu recours à l’IVG en 1971). Par contre « en quête de followers », ça, on ne va pas se mentir, c’est le fin mot de l’histoire, elle a raison, la miss. La preuve, les explosions de joie twittériennes qui accompagnent l’arrivée de nouveaux venus (masculin pluriel) dans leur timeline.

 

Après ? Deux-trois personnes sautent à la gorge de celle qui a osé donné un point de vue contraire. Tout le monde s’énerve, deux camps s’affrontent. Pour faire court, les pro-décolletés et les pro-Babillage.

 

Le problème, c’est que tout le monde a raison dans cette petite histoire. Oui, bien sûr, chaque femme est libre de montrer ses seins (vrais ou pas, pourvu qu’on ait l’ivresse…). Chaque femme est en droit, également, de trouver ça un peu vulgaire. Quelque part, oui, ça l’est.

 

Mais là, où ça devient carrément intéressant, c’est que pour la plupart de celles qui hurlent à leur liberté de «penser » (oui, il y avait un petit côté Florent Pagny assez lassant), il y en a un paquet qui enrage après cette société qui exploite tellement les femmes. Alors qu’elles s’instrumentalisent toutes seules. Précision, Babillage a employé ce mot parce qu’elle s’était fait elle-même traiter de salope quand elle avait montré sa culotte. (Elle est assez fascinante : spécialiste du maquillage et relais de Geneviève de Fontenay, je trouve le mélange assez détonnant)

 

Oui… Je sais… Ce n’est pas du haut niveau, tout ça. Je ne montrerai pas mes seins sur twitter ou ailleurs. J’avais participé à la journée du slip, en mettant une photo cinq minutes qui n’était pas de moi, je l’avais d’ailleurs précisé immédiatement… Cinq minutes parce que j’étais super mal à l’aise. Qu’utiliser mon corps comme argument de vente, oui, ça me dérange, je n’aime pas me positionner comme ça, sans que cela suppose que je juge celles qui le font. J’appréhende totalement le fait qu’on puisse agir de cette façon de manière légère. Sans enjeu.

 

Pour autant, il va falloir que les gonzesses soient un peu cohérentes. Vous ne pouvez pas jouer sur tous les tableaux. Ou la société dans laquelle nous vivons ne vous pose aucun problème, auquel cas, vous êtes parfaitement libres de vous foutre à poil pour gagner du follower, de l’audience, du pognon, des mecs ou dieu seul sait quoi d’autre. Pour rien aussi, pour le fun.

 

Ou la position de la femme vous interpelle, et vous vous direz tout simplement que vous avez peut-être votre rôle à jouer là-dedans et cela supposera qu’éventuellement, vous servir de votre corps pour obtenir quelque chose, vous pose un léger problème de conscience. Parce qu’on ne peut pas taper sur la pub, les journaux féminins, les hommes, la société, celles qui font de la promo canapé, celles qui lèchent le cul du boss toute la journée en exposant leurs décolletés ou en cambrant leurs culs, Paris Hilton, Loana, Zahia en les insultant (comme j’ai pu le voir sur twitter à propos de cette dernière) alors qu’au final, elles ne font que pousser la logique de ce petit système jusqu’au bout.

 

Oui, vous êtes libres de votre corps. Mais êtes-vous si sûres d’avoir envie de le positionner comme un argument ? De vous situer uniquement en objet de désir en espérant qu’éventuellement on daigne prêter attention à votre cervelle ?

 

Non ce n’est pas rien de montrer ses seins pour gagner un concours. À moins que vous ne soyez Miss Concours du Tee-shirt mouillé du Cap d’Agde 2009. À moins que les « « pouffiasses »,comme on les nomme, de Secret Story aient votre estime. Ce n’est pas rien, et Babillage a juste dit ce que la grande majorité des mecs, au final, pensent tout bas, ne vous faites aucune illusion.

 

Je ne juge personne, c’est pas ma came de participer à ce genre de trucs. Chacune fait ce qu’elle veut. Mais justement. Babillage, certes très maladroite, a analysé la situation, telle que la grande majorité l’envisage malheureusement. Et que ça vous plaise ou non, son raisonnement tient aussi la route. Les condamnations la concernant ont été sans appel (voir ici ou là) et je vais finir par croire que sa maladresse a appuyé là où ça faisait un peu mal. La tolérance, apparemment, c’est à sens unique, curieux, non ?

 

Néanmoins, le résultat ? Que ça soit Babillage qui s’est fait un joli coup de buzz elle aussi, ou celles qui ont participé, tout ce petit monde s’est fait sa promo sur un sujet délicat. Un sujet qui est aussi un enjeu politique dans le monde : le corps des femmes. Ce que je me dis, en désespoir de cause, c’est que c’est la solidarité féminine qui en a pris un coup ce week-end. Babillage aurait du manifester son désaccord dans des termes plus choisis, moins basiques, moins caricaturaux. Et les « insultées » auraient pu expliquer l’intêret de la chose. La solidarité féminine aurait pu générer un débat au lieu de se taper dessus. Car pendant ce temps-là…. Les mecs regardent…

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