Mon arche d’alliance ou de l’amour à mon âge

12 février 2012 10 Par Catnatt

Gottlieb, William P., 1917-, photographer.

(Billet d’humeur, pas de haute philosophie hein…)

 

Il y a deux semaines, j’ai croisé un type qui m’a fait craquer. Ca faisait longtemps que cela ne m’était pas arrivé. J’en ai tiré la conclusion qui s’imposait, je serai bientôt de retour sur le marché.

 

J’ai choisi – vous avez peut-être déjà lu au détour d’un billet ma théorie sur le sujet – il y a quasiment deux ans de m’extraire de la sphère amoureuse. Par choix. Envie. Désir. Oui, le désir. Il a été assez stupéfiant de constater (je sais, je radote) que, dans notre société, une femme a le choix :

 

Ou d’être amoureuse

 

Ou d’avoir envie d’être amoureuse

 

Ou d’être en deuil d’un amour.

 

En dehors de ces options, point de salut. Sinon c’est que tu as un-problème-tu-n-es-pas-tout-à-fait-normale-tu-devrais-consulter.

 

Je vous épargne mes considérations sur le sujet, je me suis déjà largement répandu dessus. Mais voilà, il y a deux semaines, coup de cœur. Enfin… coup de corps. Cet homme m’a donné envie ; envie de caresses, de baisers, de sueur, de fièvre, de pénétrations, de soupirs, de cris, de chuchotements, de battements de cœur, de mains, de fesses, d’orgasmes.

 

Bien.

 

Le problème étant qu’avant d’en arriver à cette liste enthousiasmante, il y avait fatalement la phase préalable : Faire connaissance. (A moins de se rendre dans une boîte à partouzes, où l’on va directement à l’essentiel, si j’ose dire mais peut-être un peu trop directement voyez ? On est romantique, un peu, à peine, on s’excuse hein ?)

 

Bien.

 

Evidemment, je peux prendre l’option : on papote vaguement, on échange des sourires entendus, des fluides, des phéromones, et hop, on s’envoie en l’air, merci beaucoup, c’était plaisant, bonne continuation. Mouais. Fait, refait, archi fait. Et ce n’est pas que de cul dont je veux parler ici.

 

A 41 ans, Je sais ce que je veux et je sais ce que je ne veux pas. Je ne veux pas d’un mec forcément beau, ou riche, ou socialement attractif. Je veux un mec indépendant, autonome – j’ai rendu mon costume d’infirmière il y a deux ans – s’assumant financièrement, avec une bande de potes, des centres d’intérêt, branché politique, littérature, ou autres. Qu’il ait sa vie et que j’ai la mienne. J’ai envie d’échanger. ECHANGER. Pas donner. Et j’ai envie qu’il me fasse rire, et jouir aussi.

 

Du coup, je me disais que ça serait beaucoup plus simple si je pouvais poser trois petites questions à ce type, là, qui m’affolait sexuellement. Trois petites questions pour aller à l’essentiel, pour éviter les lendemains qui déchantent :

 

1/ Es-tu maqué (marié, en couple, en phase de séparation récente, en deuil) ?

 

Réponse : oui. Je passe mon chemin. Oui, je sais, c’est raide au vu des options entre parenthèses mais l’expérience m’a démontré que ce n’est PAS une bonne idée (du moins, pour moi). Marié ou maqué, c’est une somme d’emmerdes abyssale. Oh c’est sûr, en dehors de toutes considérations morales, on va bien s’éclater pendant quelques semaines dans des chambres d’hôtel, le compte à rebours c’est excitant. Mais ça va forcément tourner à la prise de tête quel que soit le postulat de départ (même le fameux « je ne quitterai jamais ma femme, nous sommes entre adultes consentants gnagnagna » parce qu’il suffit que je sois d’accord pour que le mec trouve ça louche et me soupçonne d’en avoir trois comme lui dans mon pieu). La culpabilité sera la meilleure amie de cette histoire, croyez-moi, je sais de quoi je parle.

 

Quant à « en phase de séparation » ou en « deuil », je n’ai aucune envie de subir les jérémiades sur madame qui ou lui pique son pognon, ou est une salope, ou est (était) une sainte. (En phase de, on n’est généralement pas très objectif et puis, après tout, il y a des tas de gonzesses qui adorent consoler, ils trouveront preneurs, je ne suis pas inquiète)

 

Réponse non, on passe à la seconde question.

 

2/ Au fait, ta bite elle est comment ?

 

Non mais c’est vrai, quoi, c’est important.

 

« Elle est énorme ». Ha. Sans dévoiler mes penchants, je peux me dire à ce moment-là « Oh chouette ! » ou « Argh ». Mais quoi qu’il en soit, au moins je m’épargne le moment gênant où on se dit nus, « merde, merde, merde, ça va pas le faire » en lorgnant désespérément vers la porte.

 

« Elle est petite ». Ha. Sans dévoiler mes penchants, je peux me dire à ce moment-là « Oh chouette ! » ou « Argh ». Voir ci dessus.

 

« Je ne sais pas, c’est quoi cette question à la con ? ». Ce n’est pas une question à la con ; mon gars, à ton âge (qui se situe aux alentours du mien normalement) si tu n’arrives pas à situer ta queue sur l’échelle mondiale de la bite, je pense que tu es une cause perdue. Et non, je n’ai pas envie de passer des heures à te susurrer « Oh mon Dieu qu’elle est grosse et dure » pour te rassurer sur un complexe justifié ou pas.

 

Un éclat de rire et un « Tout va bien, t’inquiète pas ! », nous passons à la phase 3 car nous aurons conclu à une bonne moyenne assumée. (En général quand elle est trop … la décontraction ne fait pas partie de l’échange, on sent une légère tension, si j’ose dire)

 

3/ C’est quoi ta névrose ?

 

Voilà. On y est : le noeud essentiel de tout ce bordel. Alors sans tomber dans le jargon psychiatrique qu’aucune des parties, moi la première, ne maîtrise, et pour cause, à mon grand regret tout le monde ne va pas chez le psy /chiatre /chologue /chanalyste… il s’agirait de juste pouvoir en parler simplement. Se dire franchement les choses ; si on est à peu près normalement constitué, on sait ce qui nous gouverne. Maman, Papa, la phrase assassine qui a tout brouillé, un trauma, la perte, le syndrome de l’abandon, phobique de l’engagement, la méfiance etc.

 

Et de pouvoir vérifier si nos deux névroses sont potentiellement compatibles. Avant de se détester. Avant les reproches. Avant les mesquineries. Avant…

 

Evidemment, cela n’arrivera jamais. Oh, oui, je sais, avec des raisonnements comme ça, on ne se laisse plus attraper par surprise. Ok, moi, je veux bien, mais j’ai envie d’un truc qui dure. J’ai envie d’une vraie complicité et je sais que ça passe par ces trois petites questions que, socialement, on n’a pas le droit de poser. Parce que l’amour. Amour. AMOUUUUUUUR, je t’aime tant. On est censé se jeter, dans la joie et l’enthousiasme, dans une zone total inconnue, un autre être humain, parce que le grand A. Au nom du grand A.

 

Ce grand A qui ne résiste ni au temps ni à l’usure si sexuellement et psychologiquement, ça ne le fait pas. Le défi aux statistiques ne passera pas par moi.

 

Vous me direz, et la magie dans tout ça ?

 

David Copperfield, sors de ce corps… La magie des débuts, lorsque l’on croit que l’on est fou amoureux d’une personne alors que c’est de l‘histoire et qu’au moment de la réunification réalité-rêve éveillé (ambiance Koh Lanta) c’est le drame. Ou pas.

 

Evidemment que pour certains, c’est un chemin pavé de roses (à peu près) du début jusqu’à la fin. Mais regardons les choses en face, c’est une toute petite minorité.

 

Ce qui m’a décidé à écrire ?

 

« Ainsi, au lieu de souligner les misères du couple contemporain en vue de nous donner l’énergie ou les outils pour changer nos vies et le monde, ce film, fidèle à son genre, nous pousse à les accepter et à attendre que le bonheur promis arrive un jour grâce à une rencontre miraculeuse, tout comme les pauvres espèrent devenir riches en achetant le bon numéro du loto. Pourtant dans une société organisée autour de l’intérêt du plus grand nombre, le bonheur privé devrait être aussi accessible à chacun, au même titre que le toit, la nourriture et les soins. Et comme toutes les nécessités vitales, il ne devrait jamais être suspendu à cette forme de mort à crédit qu’est l’espérance. » Marcela Iacub (voir ici)

 

Féministe avec laquelle je ne suis généralement pas d’accord mais là, je l’aurais prise dans mes bras.

 

Je crois que je n’ai plus envie d’être en couple. D’entrée de jeu, je suis une passionaria de la chambre séparée, voire de l’appartement séparé. J’ai envie d’être en duo.

 

1+1 = 3

 

Toi, moi, le duo.

 

«Un duo est tout d’abord un ensemble musical composé de deux musiciens solistes ou de deux groupes de musiciens, c’est-à-dire, deux pupitres. »

 

J’ai envie d’un truc qui n’a pas de nom, la réunion de deux solistes. Deux entités bien séparées qui jouent ensemble. Pas une fusion. Si j’avais le courage de poser ces trois questions un peu concons, je ne serais plus suspendue à cette forme de mort à crédit qu’est l’espérance. Mais je serais dans quelque chose qui serait plus un choix posé d’alliance.

 

Ha oui, c’est ça. La quatrième question.

 

4/ Tu veux bien essayer de t’allier avec moi ?

 

Après tout, c’est le symbole du mariage… J’ai bien le droit de rêver !