True Detective : au centre, le temps

16 juin 2015 0 Par Catnatt

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Première partie : True Detective, au commencement le mythe 
 
 

* La thématique du masque *

 
 
Ha le masque ! Elément à part entière dans True Detective, il existe pleinement dans « The King In Yellow », l’une des références de la série :
 
« Camilla : Vous devriez, monsieur, vous démasquer.
Stranger : Vraiment ?
Cassilda : Vraiment, il est temps. Nous avons tous ôté nos déguisements, sauf vous.
Stranger : Je ne porte pas de masque.
Camilla : (terrifiée, à Cassilda.) Pas de masque ? Pas de masque ! »
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« Tu as le diable en toi, petit homme et je n’aime pas ton visage ».

 
Etrange perspective d’être effrayé par un être à visage découvert. C’est d’abord Rust et son masque d’infiltré pendant quatre très longues années. Il perd sa fille, sa femme et plonge dans un univers où il n’est pas lui, il est autre et vit les évènements à coup de dope, de sang et de torture. Comme un écho au livre de Chambers, il y a la réaction hallucinante de Dewal : « Tu as le diable en toi, petit homme et je n’aime pas ton visage ». Il y a le prêtre aussi et son sermon lyrique dans une église de plein air : « Dieu vous connaît ! Et le visage que vous portez n’est pas le vôtre ! ». Surtout la voix ultime, celle dont on ne sait si elle est une hallucination, la voix d’Errol ou celle de Carcosa, celle qui dit à la toute fin « Maintenant enlève ton masque ! ». Qui avait raison Dewal ou Carcosa ? Rust est-il vraiment lui-même ou porte-t-il le masque du pessimiste qui évangélise son entourage ? Est-ce la raison de l’absence de miroir chez lui, le seul installé étant utilisé pour son œil, la seule chose qui reste visible lorsque l’on porte un masque finalement ? Et toujours le masque que l’on plaque sur les évènements pour camoufler la triste vérité : Rust fait croire qu’il est parti pour voir son père, enlève un homme afin de piéger Reggie ; Marty, policier ayant prêté serment a abattu un homme qui ne l’attaquait pas ; Maggie a manipulé Rust et se l’est tapée pour se venger. Les trois mensonges de nos héros. Peu importe nos distorsions vis à vis de la morale, les faits sont ce qu’ils sont et ils ont été maquillés. True story à défaut d’avoir des True detectives.
 
 

* L’unité de lieu : La Louisiane *

 
 
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Le masque de Mardi Gras, le masque que porte la Louisiane, cet état de légende, propice aux superstitions et aux catastrophes naturelles. Un personnage à part entière elle aussi. Pizzolato est de la Nouvelle Orléans et un auteur de romans avec la Louisiane en toile de fond. Il n’est pas le seul à avoir été inspiré par cette région fascinante, nombre d’auteurs ont plongé. HBO en a presque fait une spécialité, True Blood, Treme, True Detective. Andrew, Katrina, Rita, Isaac, les prénoms, les catastrophes rythment la vie de la Louisiane et par conséquent la politique de cet état. True Detective n’hésite pas quelquefois à y faire allusion. Le lieu du crime était parfait : une région où le vaudou fait partie du folklore et des ouragans qui donnent lieu à un festival de sang. Une fête ! Errol en a bien profité pendant Katrina. Quand je me suis interrogée sur les plans aériens filmés d’un hélicoptère, la Louisiane vue du ciel, Nicolas Larrouquère, chef monteur, m’a expliqué que c’était un moyen de démontrer que cet état constituait un personnage à part entière dans True Detective. Elle est indissociable, indispensable au déroulement de la série : Rust avec sa synesthésie (phénomène neurologique par lequel deux ou plusieurs sens sont associés) expérimente cette région de manière exacerbée, elle vit en dehors du monde réel dit-il comme si elle était une parenthèse où le temps ne se déroulerait pas de la même façon qu’ailleurs. Les plans aériens sont là aussi pour nous offrir une bouffée d’air afin de mieux replonger dans cette atmosphère pesante, quelques secondes de recul avant de remettre les mains dans « le cambouis ». On notera aussi que juste avant le vrai dénouement, le « coming out spirituel » de Rust, le réalisateur a fait attention de revenir à la Louisiane en enchaînant des plans aériens à rebours : de l’hôpital à la maison d’Errol au bayou à la maison de Reggie jusqu’à l’arbre de Dora lange, le temps remonte son cours, la temporalité est toujours au centre, on remonte le cercle.
 
 

* Une construction corollaire au propos *

 
 
Je ne reviendrai pas sur le fameux plan séquence de six minutes, il a été maintes et maintes fois commenté. Je vais juste parler de quelque chose qui m’a interpellé : Le choix de la teinte blanche, beige pour trois lieux : la prison de Charlie Lange, l’appartement de Rust et l’hôpital. Vu le soin maniaque apporté à cette série, je n’y vois pas de hasard. De là à en tirer des conclusions sur ce que symbolise l’appartement de Rust, je ne m’avancerai pas… Un mot aussi sur la photo de la série, magnifique, exécutée par celui qui était aux commandes de celle de « Top of the Lake » que j’ai adorée : Adam Arkapaw. Il a fait un travail remarquable.
 
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Je suis surtout frappée par le format. Beaucoup ont affirmé que True Detective appartenait plus au cinéma qu’à la série ; c’est un film de 8 heures. Je le considère ainsi, mais je me sens proche aussi de ceux qui font référence aux feuilletons du XIXème siècle. Certains grands romans classiques de la littérature française étaient des feuilletons à l’origine, Thomas Sotinel2 l’a souligné : « Le scénario doit beaucoup aux formes les plus anciennes du feuilleton avec ses allusions pesantes aux conspirations, avec son recours à des termes mystérieux, souvent prononcés dans un râle au premier rang duquel le fameux roi jaune »1. Notons qu’en fait il s’agit du roi EN jaune dans le livre de référence de la série.
 
Pizzolato et Cary Fukunaga créent ce que certains n’ont pas hésité à qualifier de futur de la série, un format hybride. Black Mirror était déjà dans cette optique là : un univers avec un début et une fin parfaitement définis, les portes entrouvertes se refermeront et ne donneront pas naissance à d’autres intrigues ; dans le cas de Black Mirror à chaque épisode, dans celui de True Detective chaque saison. Comme le dit Pierre Sérisier3 « On est dans un énorme polar de 600 ou 700 pages qui ne se presse pas, qui se moque de susciter l’impatience, un polar qui est certain de ses forces et de construction ». Autrement dit, on est dans la littérature aussi et c’est probablement l’un des points forts : ce format à cheval entre le roman, la série et le film. Nicolas Larrouquere a noté quelque chose d’assez ahurissant : aucun plan n’est jamais le même. Aucun. Regardez-bien et essayez d’en trouver deux identiques. C’est une des raisons aussi qui font qu’on a largement dépassé le stade de la série. Pizzolato va t-il partir ou se servir d’un roman oublié pour la seconde saison ? Nicolas était sceptique sur cette saison à venir : l’auteur ne disposera pas d’autant de temps de réflexion, d’espace de création que pour la première, réussira-t-il à faire aussi sophistiqué ?

 

« Time is a flat circle ».

 
Car la construction des épisodes est aussi intelligente que les contenus : « Time is a flat circle ». Dans les deux premiers épisodes, nous assistons à la mise en place de l’univers de True Detective : l’enquête, la mythologie, le tempérament de Rust, celui de Marty, et leurs vies respectives. Au troisième, ça craque un peu : problème avec Audrey et la maitresse de Marty, conflit entre Rust et celui-ci. Quatrième, on monte d’un cran : Rust est isolé, Maggie quitte Marty et ce dernier a une explosion de violence. Cinquième : résolution de l’enquête, tout rentre « dans l’ordre ». Au sixième, c’est reparti pour un tour : retour du prêtre (certes, il ne l’est plus) problème avec Audrey, Marty trompe Maggie, elle l’apprend, Rust est isolé et il est en conflit avec Marty qui a à nouveau une explosion de violence. Quasi même scène dans le salon en famille avec Marty à sept ans d’écart, même origines de la fissure à chaque fois, sa fille pour Marty (qui ne lui aura pas épargné, elle, le pêché d’être père…) et l’enquête pour Rust. Mêmes causes, mêmes effets : « On n’est jamais comblé, on ne tourne jamais la page (…) On renait dans la vie qu’on a déjà vécue et c’est le terrible destin secret de toutes les vies, on est piégé dans un cauchemar dont on ne cesse de se réveiller » (Rust). Pizzolato et Fukunaga se payent même le luxe à un moment donné d’inverser les rôles et d’envoyer Marty aux archives pendant que Rust crapahute dans son enquête. Oui, même la construction de la série obéit au mantra de Carcosa, celui que prononce Reggie et que Rust a fait sien et répète aux deux inspecteurs :« Time is a flat circle ».
 
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* Rust et Errol, même combat ? *

 
 
Cette mécanique du « Time is a flat circle » est appliquée aussi sur quelque chose de plus inattendu : Rust et Errol semblent extrêmement différents et pourtant, ils ne le sont pas, le mal et le bien sont construits sur le même plan. Dans le septième épisode, Rust dit : « Toute ma vie a été un putain de cercle vicieux (…) un cercle de violence et de dégradations, je suis prêt à le nouer ». Dans le huitième épisode, Errol dit : « L’ascension m’a affranchi du disque et de la boucle. J’ai atteint le dernier stade (…) ». Rust et Errol en sont exactement au même stade quand ils sont au bord de rentrer en collision, comme si leurs vies étaient étroitement liées, comme s’ils avaient « besoin » l’un de l’autre pour s’affranchir de leurs destins. Errol est avant tout coupable mais aussi victime de son père qui devait apparemment beaucoup trop parler puisqu’il a terminé les lèvres cousues par son fils chéri, celui-ci estimant peut-être lui aussi que « la religion était (décidément) un virus verbal »… Quant à Rust, il est fait mention de son père comme étant un survivaliste. En partant du principe que le mot anglais signifie bien la même chose qu’en français, Rust a été élevé par un type qui se préparait à une catastrophe ; les jours fastes c’était juste un accident de voiture ou une rupture des services publics, les jours down c’était une pandémie ou une guerre nucléaire. Je ne vois pas par quel truchement Rust aurait pu être un modèle de sérénité par la suite et je crains que cet entraînement n’est pas servi à grand-chose quand le drame est advenu pour de bon. Non content d’être paranoïaque, le père devait être bien toxique pour oser dire à son propre fils : « Tu n’as aucune loyauté ». Quant à la toxicité du père d’Errol, j’imagine qu’elle n’est plus à démontrer. Et si on doit faire un pont supplémentaire entre les figures paternelles, les deux ont appris les étoiles à leurs fils : noires pour Reggie et Errol «Les étoiles noires s’élèvent, je sais ce qui arrive après» et dans le cadre de la survie pour Rust.

 

« Je peux voir ton âme dans tes yeux. Elle est corrosive comme l’acide ».

 
« Viens mourir avec moi, petit prêtre » : il ne dit pas « Viens mourir », il dit « avec moi ». Errol et Rust font-ils front commun avec une bonne envie de mourir chevillée au ventre sans se résoudre au suicide ? Spéculations encore. La seule chose que l’on sait c’est qu’Errol voulait qu’on vienne à sa poursuite : « ça fait des semaines que j’ai laissé ma marque, ils auraient dû voir ». On ne saura pas à qui le « ils » fait référence, mais il voulait qu’on le trouve, ça c’est certain. Quoi qu’on en dise, Rust et Errol sur un point font exactement la même chose : ils se servent de la foi ou de l’aspiration à la foi pour obtenir ce qu’ils veulent de leurs « victimes » (sans guillemets pour Errol, avec pour Rust). La façon dont Rust utilise la religion, la quête de pardon pour obtenir des aveux est exactement la même que celle d’Errol lorsque celui-ci embarque une de ses « mariées » comme Dora Lange dans le trip de Carcosa : de la manipulation pure et dure, seule le dessein diffère ; la foi est une arme dans les deux cas. Le temps marche dans un sens pour Rust et en sens inverse pour Errol, mais ils se rejoignent encore et encore. Tout est une question de point de vue, pour le camp Carcosa, Rust est le mal : « Je peux voir ton âme dans tes yeux. Elle est corrosive comme l’acide. Il y a une ombre qui plane sur toi, fils »
 
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Alors quelle est la différence entre eux ? Elle est ténue d’après Rust : « Le monde a besoin de méchants pour tenir en respect les autres méchants ». Où commence et où finit « l’autre » ? Mais si Rust tient en piètre estime ses congénères, s’il estime que la conscience humaine est une erreur tragique de l’évolution, s’il estime que rien n’a de sens, s’il n’éprouve aucune compassion, il garde encore une empathie froide, empathie qui a vraisemblablement perdu l’adresse d’Errol : « Sais-tu ce qu’ils m’ont fait ? Ce que je ferais à tous les fils et les filles des hommes ».
 
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* Rust et la religion *

 
 
Rust n’a aucune inclinaison pour le suicide mais il garde un crucifix dans sa chambre afin de méditer dans l’idée de permettre sa propre crucifixion. Vaste sujet… Dans le genre tordue, je me pose là mais je vous garantis qu’il ne m’a jamais traversé l’esprit de réfléchir à une éventuelle crucifixion avec laquelle, par dessus le marché, je serais d’accord. Donc Rust ne fait pas la fête et passe ses soirées dans son jardin à réfléchir à tout ça. Pour quelqu’un qui n’a que mépris pour la religion, ça pose tout de même question : pourquoi s’interroger à ce sujet quand on parle de « bêtise ontologique d’espérer » en sachant que l’espérance est un des piliers de la religion chrétienne ? C’est peut-être là toute la conversation entre Jésus sur une croix pendue à un mur et Rust qui le regarde en se demandant comment peut-on se sacrifier pour une humanité vivant dans un vaste marché de dupes, « le temps, la mort et l’absence de but » ? Le problème quand on rejette quelque chose méthodiquement et systématiquement, qu’on n’est pas capable d’entendre les arguments du camp adverse, lorsqu’on n’arrête pas d’en parler comme Rust le fait, c’est qu’en général, on est fasciné par ce quelque chose. Attirance-répulsion. « Quand les gens me donnent des conseils, généralement, ils parlent d’eux-mêmes ». Je te retourne le compliment, Rust. Marty a raison lorsqu’il dit dans l’église de plein air – cette conversation hallucinante, la condescendance de Rust et la finauderie de Marty – que tu paniques. Quand tu affirmes, Rust, que la religion réécrit les schémas dans le cerveau, qu’elle altère toute pensée critique, toi et ton pessimisme, que faites-vous ? N’est-ce pas une sorte de catharsis aussi ? Une projection de ta peur et de la haine de toi-même ?

 

« Au bout du compte, tu te caches derrière la rationalisation comme tous les autres ».

 
Sauf qu’il n’y a pas grand monde pour répondre, face à celui qui sera d’abord « le percepteur » (surnom donné par ses collègues de travail), ensuite « Crash » (surnom de Rust lors de son infiltration apparemment) pour finir « petit prêtre » (c’est ainsi que le nomme Errol), surnoms comme une manière de souligner une évolution. Enfin, si, toujours Maggie. Maggie n’a peur de personne et surtout pas de Rust : « au bout du compte, tu te caches derrière la rationalisation comme tous les autres » et je lui donne entièrement raison. On a beaucoup reproché à True Detective son sexisme. A mon sens, c’est un faux procès. Ce n’est parce que les personnages féminins ne sont pas tout en force qu’ils sont diminués. Il y a un discours extrêmement féministe mine de rien. On a beaucoup reproché à True Detective le manque de puissance des personnages féminins. Mais qu’est-ce que la puissance ? La puissance économique ? La puissance de caractère ? La puissance verbale ? La puissance « actionnelle » ? On voudrait une démonstration de force ? Mais qu’en est-il réellement ?
 
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* Le féminisme, absent de True Detective ? *

 
 
Puissance économique ? Il faudrait préalablement souligner que les classes aisées sont quasi inexistantes dans cette série. Elles sont en guest sinon on est en pleine classe moyenne et défavorisée. On n’a pourtant quasiment que des personnages féminins qui travaillent, s’assument d’une manière ou d’une autre et n’hésitent pas à l’ouvrir quand ça s’impose. On a même un plaidoyer pour la prostitution dans la conversation qui oppose Marty et la tenancière du ranch, une femme de caractère indéniablement : « C’est un corps de femme. C’est un choix de femme. De tous temps, des femmes ont baisé gratuitement. Ajoutez-y les affaires et ça ne va plus. Pourquoi des gens comme vous ne supportent pas cette idée ? » . La puissance verbale ? Et quid de la sortie de Lisa, maîtresse de Marty : « Tu crois que c’est acceptable de traiter les femmes comme tu le fais ?! ». A aucun moment Lisa ne se berce d’illusions et s’empêche de vivre, ce qui a le don d’énerver Marty. La puissance de caractère ? C’est sous-estimer l’impact de Maggie : « Dans une vie antérieure, je me suis épuisée à manœuvrer des hommes brutaux qui pensaient être intelligents ». Ce n’est pas parce qu’on aligne phrases sur phrases, des phrases avec des mots compte triple ou en hurlant plus fort que les autres qu’elles sont intelligentes. On entend peut-être moins les femmes, mais elles racontent nettement moins d’âneries. Si on regarde la pyramide de Maslow, la vie intérieure arrive en dernier (ce qui ne sous entend pas du tout que pendant qu’on cherche à apaiser ses besoins fondamentaux, on n’a pas de vie intérieure, simplement, on n’éprouve pas le besoin de l’ouvrir systématiquement à ce sujet). Dans le contexte social choisi par l’auteur, pas très étonnant qu’on n’entende pas de grande tirade sur la vie, la mort, les vaches par des femmes, elles sont probablement trop occupées à tenter de tirer leur épingle du jeu. Ce n’est pas True Detective qui est sexiste, c’est le monde.
 
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Non, s’il y a un fond de machisme dans True Detective, c’est dans l’absence de grande figure du mal féminine parce que même la mère infanticide est en quelque sorte déresponsabilisée par le diagnostic de Rust : syndrome de Munchausen par procuration. Nous noterons que Rust, féru de psychologie et de philosophie, s’assied allègrement sur sa culture dans ce cas-là : « Si vous en avez l’occasion, vous devriez vous tuer ». Il semblerait que les maladies mentales ne fassent pas du tout de sa grille de lecture, ce qui est d’une bêtise sans nom pour quelqu’un d’aussi sophistiqué dans son raisonnement ; c’est là où on réalise que lorsque quelqu’un estime à raison qu’il a atteint un certain stade de culture et d’analyse, il finit par se situer au dessus des autres, il devient « Dieu » à ses propres yeux et choisit, à tort, d’écarter ce qu’il a appris. Les femmes ne font pas de mal « gratuitement » dans True Detective, elles sont malades ou abîmées – La demi-sœur d’Errol est largement victime elle aussi de sa propre famille même si elle est complice – les femmes se démerdent, tentent de s’en sortir, mais elles sont souvent victimes. Et si statistiquement, cela correspond à une réalité, il n’empêche qu’en ce monde, certaines femmes peuvent incarner le mal à l’état pur. Ce ne sera pas le cas dans True Detective. Finalement on pourrait même soupçonner une misandrie, il n’y a pas un homme pour en rattraper un autre : destructeurs plutôt que constructeurs, ils mentent, tuent, trompent, salissent, torturent, se battent.
 
Et au milieu de toutes ces petites ou grandes trahisons, ils fondent en larmes. J’ai beau essayer de me souvenir, je ne vois aucune femme pleurer ici (à part la mère infanticide), par contre j’ai vu bien des hommes s’effondrer…
 

 
(à suivre la semaine prochaine : True Detective, part 3 : au dénouement, l’ironie)
 
Billet initialement publié sur Playlist Society le 9 avril 2014
 

 
 
Références :
1 – Wikipedia « The King in Yellow »
2 – « True Detective, la théorie du roi jaune et celles des auteurs » par Thomas Sotinel
3 -« True Detective, six minutes de pur polar » par Pierre Sérisier