Ne jamais revenir

12 juin 2016 2 Par Catnatt

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Et voilà, le dernier week-end dans le 19ème. J’ai enlevé photo après photo sur les murs de la cuisine, douze ans de photos de magazines, de phrases de bouquins, de cartes postales d’Agnès et Virginie. Les placards sont vides, ma vie en cartons. J’ai fait mes dernières courses hier la nostalgie au coeur.

En fait, j’ai réalisé hier que cet appartement, ce quartier était avec ma maison d’enfance l’endroit où j’étais restée le plus longtemps. C’est peut-être pour ça que ça me déstabilise autant. Et puis c’est aussi la seconde fois que je subis le changement, je suis toujours partie de mon plein gré sauf ces deux fois-là. Ça doit taper sur un truc ancien, une sensation heurtante. J’ai été très triste que l’on parte de l’avenue de la libération quand j’ai eu 14 ans et je n’y suis jamais revenue.

Je ne reviens jamais.

Je déteste le 17ème arrondissement pour ces raisons-là. J’ai habité rue Poncelet et j’ai détesté ça. J’évite cet arrondissement tant que je peux et c’est la même punition pour le 16ème arrondissement dans lequel j’ai pourtant habité pendant 6 ans à Jasmin et avenue Exelmans. Je ne foutrais plus jamais les pieds à Bordeaux où j’ai vécu 7 années, je ne peux pas, c’est physique, je n’y arrive pas. Je suis revenue une fois à Valence, je crois et je n’ai plus jamais arpenté les rues de Guilherand. Les 3 mois à Rueil Malmaison m’ont laissée un souvenir cuisant. Je cherche un endroit où j’aurais fait un genre de demi-tour, heureuse ou malheureuse, il n’y en a pas.

Je ne reviens jamais là où j’ai vécu. Et je crois que le 19ème n’est pas près de me revoir. En ce moment, quelqu’un m’annoncerait qu’il vient y habiter, je pourrais lui sauter à la gorge ; ça passera. Je crois que ça fait partie de mon système, une ex-amie m’avait balancée en pleine figure un jour que pour elle, j’étais capable d’effacer les gens de ma vie du jour au lendemain. C’est vrai, mais ça n’arrive jamais pour rien et ça doit marcher pareil pour mes maisons. Une façon de ne pas regretter.

Je n’ai aucun regrets. Ou je m’arrange pour ne jamais en avoir et ne pas revenir sur mes pas fait partie de ma stratégie inconsciente. Toujours avancer, ne pas regarder en arrière sauf si je choisis dans ma tête de le faire. La nostalgie c’est du poison.

Ce qui ne me manquera pas : la transhumance Rosa Bonheur -métro Jourdain, entendre ma voisine, les problèmes de flotte de ce p.. d’immeuble, nettoyer cette saloperie de moquette, l’envahissement dominical aux Buttes Chaumont. Je cherche, je n’en trouve pas tant que ça. Pour tout ce qui va me manquer, j’attrape une pelle, je creuse bien profond et je jette dans le sac poubelle où j’ai enfoui toutes les photos de la cuisine. Les cartes postales sont rangées dans une boîte à souvenirs, je n’y penserai plus.

Et il est fort probable que je ne foutrais plus jamais les pieds rue de la Villette.

“On ne peut comprendre la vie qu’en regardant en arrière ; on ne peut la vivre qu’en regardant en avant. Kierkegaard ”

En somme, le mot juste (le beau geste) : écoutez-moi cette merveille de Bertrand Belin et Camelia Jordana (merci Henri !) :

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