Bilan 2013 de blog (la tête dans le miroir)

29 novembre 2013 2 Par Catnatt
Photographed in November 1950.

Photographed in November 1950.

Drôle d’année 2013. Je me suis fait secouer un peu dans tous les sens, je me suis secouée toute seule dans tous les sens. En tout cas, ça me laisse un drôle de goût dans la bouche. En même temps, je ne suis pas tellement étonnée, en 2003 j’ai attaqué une nouvelle vie et dix ans après, l’ombre du bilan plane. Non, ce qui me perturbe vraiment, c’est que je cherche désespérément l’impulsion. Je ne la trouve pas. Moi qui suis plutôt du genre « lapin duracell » – un point commun hélas avec Sarkozy – je me transforme en vache qui regarde passer les trains. Avouez qu’en terme d’estime de soi, on peut trouver mieux. L’on me dit qu’il faut que je m’accorde un répit ; j’entends, mais je me demande si la déconfiture commence lorsque l’on quémande une accalmie…

 

En attendant, comme chaque année ou presque, je me penche sur ce que j’ai commis comme textes cette année. Quels sont les dix plus importants ? Dix sur une quarantaine. L’ironie de l’exercice, c’est que j’ai dû constater, vexée et agacée, que je n’arrivais même pas à en trouver dix. Ce que je vois lorsque j’observe mon admin de blog c’est que j’ai dégringolé doucement mais sûrement tout le long de ces onze mois. Voilà, prends ça dans les dents, Nat. Je n’ai pas été capable de faire plus de deux textes à « portée universelle », des billets qui parlent à tout le monde. Je ne parle même pas de qualité mais de tentatives. Ce que je vois lorsque j’observe ce tas de mots – et le bilan de l’année sert à ça précisément -c’est que j’ai été très autocentrée ou superficielle comme si j’étais incapable de produire un tant soit peu de fond sur tout ce qui n’est pas moi. Ca sonne comme un reproche, ça n’est qu’une constatation.

 

Alors que reste-t-il ?

 

J’ai fait rire, c’est déjà pas si mal : « Une journée de féminisme ordinaire »

« Je veux éliminer tous les mecs de la surface de la planète, prendre le pouvoir et surtout ne jamais construire notre avenir avec les hommes. C’est simple, je me balade toujours à l’extérieur nue et éructant avec mon fusil d’assaut pour tirer à vue dès que j’aperçois une couille… ( je vous laisse méditer sur cette vision quelque secondes)

 « Le trolling de locataires existe » qui a bien cartonné.

« Victoire, à ce moment-là, connaît un vrai moment de solitude. « Pourquoi ? » Perplexe, elle se dit que ça se trouve, il faut qu’elle remette de la lessive et de l’adoucissant parce que ça se trouve la quantité de produit aide la machine, ça doit être espagnol comme truc. Victoire ne réfléchit plus, elle est désespérée. »

  

Concernant les billets politiques, bah, j’ai fait dans le texte réactif dans l’ensemble. C’est pas que je trouve ça mauvais, c’est juste que je ne me rappelle même pas de ce que j’ai pu mettre dedans. Le seul dont je suis vraiment fière, mais qui reste une déchirure, c’est celui de ma demande de débaptisation : « De guerre lasse, quitter l’Eglise catholique« . Je campe sur mes décisions, mais croyez-moi quand on a la foi, cela reste difficile.

« La question de l’âme n’est pas une question de rites. Elle n’a que faire des règles des hommes, elle tâche de vivre en conscience. La question de l’âme n’est pas affaire de sexualité. Ce sont les hommes qui s’en sont mêlés. (…) Comment pouvons-nous nous rapprocher de Dieu en toute confiance quand vous ne savez qu’interdire, commander et reprocher ? Que faites-vous de sa volonté qui a été de nous offrir le libre-arbitre ? Libre de venir à lui ou pas ? Libre de croire en lui ou pas ? Libre d’aimer qui nous souhaitons et de vouloir le faire savoir au monde ? Il nous a fait le plus beau des cadeaux et vous le saccagez »

 ust Sister Anne… Whaw…Comme a dit Henri, celui-ci il aurait fallu l’encadrer, format 4/3 sur les Champs-Elysées.

  Chère Catnatt,

En lisant attentivement votre texte, je suis touchée du sérieux de vos remarques et blessée de la suffisance de ceux qui le prennent avec désinvolture.
Je suis religieuse, dominicaine, et j’ai 45 ans.
Bien souvent je me suis dit que sans la vie religieuse qui me tient, je ne sais si j’aurais eu la force de ne pas me décourager. Je ne reprendrai pas tout ce que dit Antoine il y a deux jours, que je partage. Pourtant, juste une chose :
Oui, l’Eglise depuis son origine est faite de bras cassés. Et Paul, qui est tout sauf bête, est tombé de la lune le jour où il a compris que le respect de la loi et l’intransigeance l’avaient conduit à persécuter les chrétiens, en oubliant le fondement de la loi : l’amour gratuit de Dieu. La conversion de Damas, c’est la prise de conscience du pouvoir mortifère de cette intransigeance et en même temps, la prise de conscience de l’infinie bonté de Dieu.
Voilà sans doute ce qui nous manque aujourd’hui, la prise de conscience de l’infinie bonté de Dieu.
Le Christ que nous confessons a choisi de mourir du côté des coupables, entre deux pauvres types, pour dire par ce geste qu’il était irrémédiablement du côté des coupables, par choix, pour dire que les coupables avaient un avenir, que les pauvres types avaient une dignité de princes. Voilà ce qu’il dit, lui le roi sans pouvoir qui nous donne sa royauté.
Si l’évangile a eu de l’importance pour vous, ce que je crois percevoir dans votre texte, continuez à le lire. Continuez à vous promener dans la Bible pour y trouver des amis. Et si je puis me permettre, continuez à faire quelque chose avec d’autres, au nom de ce que vous avez cru juste, quelque chose de gratuit, n’importe quoi, pour d’autres.
Le jugement n’appartient qu’à Dieu. Il a choisi d’être jugé par les hommes plutôt que de juger. Nous qui croyons être chrétiens, prenons garde de nous prendre pour Dieu en jugeant ou en accusant autrui. Jésus, dans l’évangile de Jean, au chapitre 17, dans cette grande prière qu’il adresse à son Père alors même que Judas vient de le vendre et Pierre de le trahir dit ceci : « ils ont gardé ma parole. » On aurait envie de lui dire « mais tu te plantes, ils t’ont trahis ! ». Mais non, il ne se trompe pas. Au coeur même de sa prière, dans le secret de cette relation si intime avec le Père, même là, il continue de justifier ceux qui l’ont trahis : « Ils ont gardé ta parole ». A l’heure de sa trahison par l’homme, il a confiance en l’homme.

J’aime à croire que la foi, bien plus que de croire en Dieu, c’est croire que Dieu nous fait confiance.

Que cette confiance continue de vous habiter. Je prie pour vous.
Anne

  « Féminisme et musique, là où commencent mes frontières… « . On m’a reproché de ne pas avoir vraiment creusé et c’est vrai que j’aurais pu faire mieux.

« Alors, oui, j’ai réalisé que mon féminisme s’arrêtait à la musique. C’est terrible, n’est-ce pas ? La seule réponse que j’ai trouvée, poussive et pénible, c’est que je ne vois pas le monde à travers le prisme du féminisme en permanence. Et en particulier à propos d’art. Est-ce une faute, une erreur, un aveu de faiblesse ? Probablement. Sûrement. J’admire énormément les femmes qui appliquent réellement le postulat que tout est politique. Je n’y arrive pas.Pour être tout à fait honnête, je me méfie généralement des gens qui ne voient le monde qu’à travers un prisme particulier. Ils ne sont jamais loin du fanatisme. »

  

Et après ? Après des textes personnels. Ce qui est extraordinaire avec le blog perso, c’est que l’on peut presque toucher du doigt sa problématique du moment. Je l’ai souvent dit, je ne suis jamais arrivée au même résultat avec un journal intime. Je me psychanalyse en public. Il y a incontestablement une forme de catharsis là-dedans, ça me fascine. Donc lorsque je me pose et que je regarde ce que j’ai mis sur la table, je constate un fil conducteur : mon problème en ce moment – drame de la crise de la quarantaine, comme c’est original ^^ – c’est de trouver comment me positionner en dehors de « être l’enfant de » et « être la mère de ». Je ne sais si c’est clair, j’en prends conscience au fur et à mesure que j’écris.

  

Ca commence avec « Bon anniversaire, Baptiste », mon fils :

« Oh bien sûr, je ne laisse rien transparaître, c’est entre moi et moi, cette affaire. C’est pas très sain tout ça mais j’ai l’espoir fou qu’en essayant de comprendre tout ça, ça le devienne. J’ai l’espoir fou qu’en ne craignant jamais d’affronter vos questions, en ne les évitant jamais et en répondant franchement que ça le devienne, sain… J’ai l’espoir fou depuis que tu es là et c’est si compliqué d’être le père ou la mère d’un être humain, si tu savais… »

 « On a tous auprès de soi un référent(e), plus âgé(e) dont on sait que si l’on se retourne juste avant d’avancer, juste avant de choisir, juste avant de nous élancer, l’on sait que cet être humain sera derrière nous, souriant et réconfortant, râlant parfois, mais oui, derrière nous, quoi qu’il arrive et dont on entend la voix nous rassurer, même s’il doute en son for intérieur, mais nous rassure quand même, oui, quoi qu’il arrive : « tout ira bien ». »

    « La fin d’une quête, le début d’une nouvelle ? » :

« Ça peut sembler délirant comme ça mais j’avais oublié que j’avais été une enfant même si je suis littéralement obsédée par les traumatismes de mon enfance. Je ne sais si vous comprendrez la nuance (…) Certaines personnes pensent que la vie est faite d’un seul cours, quelque chose d’ininterrompu, qu’on avance, qu’on est obligé d’avancer, qu’il n’y a qu’un seul fleuve, un seul souffle. Je n’y crois pas. Je crois aux chemins de traverse qui te ramènent, certes, toujours vers une route, mais tu quittes régulièrement celle-ci pour chercher ce dont tu as besoin. »

 la table des négociations » :

« C’est peut-être l’un des derniers combats qui lui reste à mener : lutter contre cette tentation. Elle a connu tant de chutes, elle se relevait d’un geste léger mais les muscles fondent, les articulations se font plus raides, quelques rhumatismes, les vertèbres blessent et la colonne vertébrale se tord, la souplesse s’enfuit et la rigidité se répand. »

 « Il était trop tôt pour ma défaite » est fondamental et fondateur. Ce dont j’ai pris conscience a été une immense claque dans la gueule. Je n’arrive même pas à le relire vraiment :

« Si je ne suis plus cette gamine définie entièrement par le décès de sa mère, qui suis-je ? J’étais vaincue lorsqu’elle a cessé d’être le recours. Que vais-je faire de la trahison d’un pacte fou signé avec mon diable ? Est-ce que l’on passe tous des pactes dingues en secret qu’on ne s’avoue pas ? Des pactes de gosses perdus ? Est-ce qu’il ne s’agit que de ça en vérité ? Peut-on rester aveugle et sourd à son propre champ de bataille, sa propre guerre ? Toute sa vie jusqu’à ce qu’on en crève ? »

  une gosse assise sur un banc attendant que sa mère revienne la chercher « , qui suis-je ? Et je me rends compte qu’avec mon père qui vieillit et ma mère disparue, je vais rester seule, sans recours. C’est probablement ça le déclencheur de la chute. J’ai peur. Je cours me cacher dans un coin et je ne pourrais retrouver l’impulsion que si je sors de ma planque.

      « La vieille horreur revenait, vouloir et vouloir et ne pas avoir… ».