Passe ou casse (Good Days)

4 juillet 2021 3 Par Catnatt

Je n’étais pas partie pour écrire sur ce sujet, mais après avoir discuté avec une jeune femme qui a craqué elle aussi, je mets ça aussi sur la table. C’est mon côté Michel-Berger-Je-veux-chanter-pour-ceux.

Je l’ai pas vu arriver, je suis raisonnable, j’essaye de faire tout bien, je sais que je suis crevée, je fais du yoga et je suis suivie par MA chiro depuis 3 ans (je mets un pronom personnel parce que je parle toujours d’elle comme ça, je suis propriétaire de ma chiro en fait), j’essaye de faire tout bien, mais ça s’enrayait régulièrement.

Je me suis effondrée il y a 10 jours. J’ai envisagé de me présenter à Sainte Anne pour être admise en cure de repos. Oui, on en était là, ça me semblait une solution évidente. Le truc c’était que j’avais prévu un week-end de retrouvailles en Ardèche avec mes copines du lycée. Je n’avais pas vu certaines depuis 32 ans.

Le jeudi, j’étais roulée en boule après m’être mise en arrêt maladie : j’ai eu 3 arrêts en 25 ans de carrière professionnelle ; un pour une grippe, le second pour le covid et le 3eme maintenant pour « épuisement professionnel ».

Le facteur déclencheur ? Peu importe. Je me suis littéralement désintégrée de l’intérieur, j’ai tapé sur toutes les raisons du monde pour justifier cet effondrement et il aura fallu 10 jours et un partage pour enfin comprendre. Bacicoline en parle régulièrement sur son instagram et j’étais comme elle, depuis un an et 3 mois, j’étais confinée de ma vie en fait, le travail avait pris toute la place, le travail, les potes au travail, je travaille, travaille, travaille. J’ai rencontré beaucoup de difficultés à réenclencher des interactions physiques avec mes amis. Et je crois bien que le déconfinement a dégoupillé une décompensation. J’avais tout imaginé sauf ça.

Certes le covid m’a bien laissée sur le carreau, ça était le premier dérapage, j’ai eu beaucoup de travail au mois de mai, mais en temps normal, j’aurais pu encaisser. Là, j’ai juste attendu inconsciemment le facteur déclencheur. Est ce que j’aurais pu arrêter à temps ? Certains m’en avaient parlé sur le ton du reproche ou de la compassion : tu es au bord du burn out.

« Tryna make sense of loose change
Got me a war in my mind
Gotta let go of weight, can’t keep what’s holding me
Choose to watch
While the world break up and fall on me »

C’est mon défaut que j’encadre comme je peux depuis des années, je suis jusqu’auboutiste, il y aura toujours une thématique où je vais pousser jusqu’à ce que ça craque. Certaines m’en parlent avec des pincettes : Nathalie tu es excessive, tu prends toujours les choses trop à coeur. C’est vrai qu’on dit rarement prendre les choses à coeur, on ajoute souvent le trop parce que le coeur, c’est encombrant, pas vrai ? Même sans le trop, il y a toujours un petit côté condescendant dans cette expression qui me gonfle prodigieusement. Faut prendre les choses comment en fait ? Avec la tête ? Avec raison ? On fait surtout comme on peut et j’avoue que je barbote dans une autosatisfaction crasse à l’idée que je reste très émotive, à 50 ans, je trouve ça rafraichissant. Je reste de manière tangible la petite fille que j’ai été et en ce qui me concerne, c’est plutôt une bonne nouvelle.

Mais cette petite mécanique m’a autant foutu dans la merde que sauver mon cul en fait. C’est celle qui me pousse à sauter dans un train avec mes deux gosses, c’est celle qui me fait péter un boulard et convoquer mes patrons à Bordeaux pour dire que je me casse le jour-même et avec des tunes merci beaucoup, c’est celle qui me fait déménager en 48h de Paris à Bordeaux, c’est celle qui me poussera à faire mes valises 3 jours après mes 18 ans. Ça c’est pour les plus spectaculaires dont je me souviens.

Et c’est curieux que ça soit arrivé juste au moment où je retrouvais celles que j’avais lâché sans remord et foutues dans une sacrée merde par la même occase justement à mes 18 ans. Je suis restée la même sauf que je suis moins tarée et que je prends moins de risques. Disons que j’ai le pétage de plomb plus convenable, plus élégant. Toutefois, ce timing est intéressant, bouclerai-je la boucle ?

En fait l’été dernier, finalement je n’ai pas tellement vu mes potes, j’ai beaucoup bossé et je suis partie en vacances. Et en octobre, on était reparti pour un tour, c’est bien ça ?

« All the while, I’ll await my armored fate with a smile
Still wanna try, still believe in (good days)
Good days, always (good days)
Always inside (always in my mind, always in my mind, mind) »

Oui Baci a bien raison et on ne doit pas être les seules, on décompense depuis le déconfinement. J’imagine que ça ne touche que ceux qui ont joué le jeu des différentes règles, le retour à la vie normale est cahotique et bien moins fluide que le premier confinement dans lequel j’avais glissé avec un sens de la coopération qui me pose question parfois.

Je me suis effondrée il y a 10 jours. J’ai envisagé de me présenter à Sainte Anne pour être admise en cure de repos. Mais le week-end avec les copines. Je me suis dit : ça passe ou ça casse, ou je finis aux urgences pendant ces deux jours ou je reviens à moi. J’en ai parlé à Géraldine dans la voiture, elle m’a souri comme elle fait depuis toujours, tout ira bien.

Et ça l’a fait. Ça l’a grave fait. J’ai passé deux jours avec ma bande de copines et la famille et les conjoints et les enfants, 35 personnes et des tables partout, des lits partout, j’ai entendu parler de tout sauf de prod. J’ai ri comme j’avais pas ri depuis longtemps. Je me souviens à présent précisément pourquoi c’étaient mes copines, c’était pas pour rien, c’était nécessaire.

Je suis rentrée à Saint Ouen, j’ai été un peu tristouille, mais rien à voir avec la lourdeur dans l’estomac, les sanglots et l’impossibilité de respirer normalement, la crise d’angoisse du lundi dans mon fauteuil, non rien à voir. La légèreté revient mine de rien.

Les jours ont passé, je n’ai rien fait de spécial, je me suis accordée un dej et un rendez-vous avec ma chiro. Et me voilà dimanche prête à bosser consciencieusement et investie parce que je ne saurais jamais faire autrement. Mais me revient en tête une décision que j’avais prise il y a 25 ans, que je me débrouillerai toujours pour ne pas ramener mon taf quand je rentrerai chez moi. Je n’ai jamais voulu faire carrière comme on dit, ça ne m’intéresse pas.

Pour ma part, je n’ai pas été seulement déconfinée selon les règles de l’état, il y aura pour toujours une partie de ma vie où un virus aura réussi l’exploit de me rendre obsédée par le taf. Je dois me déconfiner du travail et ça devrait être assez simple à mettre en place.

Une expérience de plus, je ne sais pas si on aura une 4eme vague, d’autres couvre-feux, mais en ce qui me concerne, il y a une porte qui se referme, je ne pensais pas que ça se passerait ainsi. Ça restera une période ambivalente, ce covid.

Passe ou casse, c’est passé. Et si jamais certains et certaines d’entre vous sentent que vous n’allez pas bien, ne vous culpabilisez pas, arrêtez si vous pouvez et retapez vous. Ça passera, ça passera ça aussi et les beaux jours reviendront.

Ce clip est… Comment dire… Allez il vous arrachera bien un sourire et la chanson est une tuerie.