La France,cette escroquerie

8 août 2010 0 Par Catnatt

J’ai lu, comme vous tous, les résultats du sondage concernant les dernières mesures proposées par N.Sarkozy : perte de la nationalité française, les roms, les parents en prison en cas de délinquance juvénile etc.

 

On ne va pas se leurrer, c’est un plébiscite. Le retour des 80% mais pas tout à fait comme on l’imaginait. La majorité des Français est d’accord pour ce mode de fonctionnement, comme un permis à points de la nationalité et même, si tout le monde souligne le caractère perverti de la formulation des questions, les chiffres sont tels qu’il faut se résoudre à affronter la triste évidence.

 

Ne nous réfugions pas derrière l’absence d’option « sans opinion ». Force est de constater que lorsqu’on oblige les sondés à répondre, ils tendent de manière écrasante à être dans le bannissement. Sans opinion, vote blanc, ce ne sont pas eux qui choisissent, mais quand on les contraint, voilà le résultat. La masse silencieuse et inerte, dont on ne sait ce qu’elle pense. Vous venez d’avoir la réponse. On s’émeut du choix de média, sondage via internet. Mais c’est pire !! Internet est réputé pour être un média « trotskyste » non ? Si j’entends aujourd’hui tant de gens contester les résultats de ce sondage, c’est que la pilule est certes bien amère, mais faut-il pour autant encore trouver des excuses ?

 

 

Le choc a été grand pour moi. Immense. Dévastateur. Ce qui fait le socle de notre pays, le premier article de la déclaration des droits de l’homme, le premier point de notre constitution,

 

« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. »,


vient d’être abattu à bout portant, assassinat médiatisé en grandes pompes. Des citoyens de première zone et de seconde zone. Quand ces gens ont répondu, ils n’ont même pas réfléchi plus loin que le bout de leur caddy. Nous, Français, nous en avons marre, nous voulons que ça change, nous voulons des coupables, vite et les sortir du pays à grands coups de pied au cul. Rendez-nous notre bel argent, notre confort, notre douceur de vivre. Comme si tout cela avait déjà existé, comme un passé enchanteur, beau comme un film sur les années 50 (une pensée pour Kowalski), une France heureuse, sereine, riche, très riche, aux doucereuses couleurs pastel…

 

La grande illusion et le grand rejet.

 

Les Français sont fondamentalement racistes, au sens sociologique du terme, et même si nous le sommes tous au final, la majorité envisage sereinement de foutre dehors les siens. La dernière fois que ce genre de procédure a été envisagé, c’était au temps de Vichy, cette période de la honte où la collaboration et la délation régnaient en maître. À présent, dans nos familles, nous avons tous, évidemment, un résistant. Encore le syndrome du passé revisité qui frappe, comme si toute cette résistance avait vraiment existé, belle comme un film américain, une France héroïque, convaincue, libre, très libre, aux sombres couleurs rouge, noire et blanche…

 

Mon pays réécrit son passé au quotidien, les livres d’histoires pudiquement épargnés, mais chaque jour, il l’enjolive pour mieux supporter sa médiocrité, se réfugiant de plus en plus dangereusement derrière des tentatives d’autrefois pour mieux affirmer « Non, nous n’y arrivons pas ».

 

Nous sommes à la croisée des chemins. « Le vivre ensemble » a été tenté et la majorité pense que ce fut un échec. Ce n’est pas rien ce qui se passe. Avant, United Colors of Benetton s’affichait en quatre par trois, esquissant l’avenir, beau comme une publicité des années 80, une France métissée, égalitaire, solidaire, très solidaire, aux couleurs vives du monde entier.

 

À présent, l’on regarde les doux rêveurs droit dans les yeux en leur expliquant avec une bonne foi consternante que ça ne fonctionne pas. Trop différents. La majorité l’a compris, le bonheur est dans l’uniformisation, le lissage, frères d’identité, de culture, de religion, d’origine. Se ressembler pour que cela reste supportable, éliminer les taches qui salissent notre harmonie pour, enfin, redevenir un pays modèle, beau comme un rayon de supermarché agencé, une France occidentale, sans délinquance, grasse, très grasse, à la vide couleur blanche.

 

La France a régné dans le monde grâce à des idées qu’elle ne mérite plus, qu’elle n’a jamais mérité en fait. La France, une escroquerie sur plusieurs siècles. Elle a produit de grands intellectuels, s’est confondue avec eux alors que jamais, on s’en rend compte aujourd’hui, le peuple n’a pensé leurs grands principes. Le drame c’est que notre pays n’a plus de penseurs dignes de ce nom, rassembleurs, capables d’emmener une foule à la poursuite d’un rêve plus grand que l’humanité. La masse et les visionnaires se sont confondus dans une espèce de conception étriquée, lâche qui fonctionne à grands coups de bouc émissaire.

 

« Les grands hommes font l’histoire, la masse est l’histoire »

(Citée de mémoire, Alain Damasio en parle, il semblerait que cela soit une phrase de Marx)

 

Aujourd’hui nous en sommes à « la masse est et fait l’histoire ». Le Sarkozysme n’est que l’expression d’une déroute française, la ligne Maginot de notre morale allègrement franchie. Nous, Français, redeviendrons grands lors de la libération, la libération économique, où nous serons tous propriétaires et nantis. En attendant, pendant l’occupation de la crise, déterminons qui est vraiment français ou pas. À quoi bon avoir fait le débat sur l’identité nationale, si finalement tout se joue sur les origines et la date d’arrivée ? Pour préparer le terrain ? Insidieusement, faire parler les français, analyser les réponses, patienter un peu, et dans un grand coup d’éclat, affirmer le bilan de cette opération ? Ils n’auraient pas dû ? Et si la France affrontait ce qu’elle est vraiment pour une fois ?

 

La France, le pays des droits de l’homme, quelle ironie, le pays des droits de certains hommes, une escroquerie révélée, triste mirage, disparu avec l’absence de chaleur humaine, cette haute température qui le crée. En réponse à Ulrich qui parlait des élites haïssant la démocratie, je réponds que non. Bien au contraire, la démocratie est devenue leur meilleur soutien. L’élite a juste cessé de rêver d’un monde meilleur, à quoi bon, elle s’adapte au peuple, elle survit si bien en servant ce qu’il veut sur un plateau. Pire, elle n’est que plus forte aujourd’hui alors que les grandes idéologies se sont fracassées contre la réalité. Pour subsister, elle a compris que la nation ne rêve plus de liberté, comme si elle était définitivement acquise ; Pour se perpétuer, elle a compris qu’il était nécessaire de dire tout haut ce que la masse pense tout bas, honteusement, l’affranchissant du déshonneur. Elle peut écorner la Révolution, Mai 68, tout ce qui fut le rayonnement de la France, la majorité approuve. Finalement la grande réconciliation est arrivée.

 

Même l’opposition ne hurle pas tant que ça, sachant pertinemment qu’elle ne peut plus affirmer de manière tranchante « C’est ignoble de rejeter ainsi » à moins de vouloir perdre les élections. Gauchistes mais pas trop. Ce n’est pas pour rien que l’extrême gauche se casse la gueule pendant que son extrême inverse prospère. C’est cela qui se passe : les Français ne croient plus en eux-mêmes, ils se pensent carnassiers, ils se savent carnassiers, convaincus que l’homme est fondamentalement mauvais. Rousseau s’est fourvoyé, 39-45 en fut la démonstration, le stalinisme acheva, la France ne s’en relève pas, subissant une lente mais certaine déchéance.

 

L’élite ne nous tire plus vers le haut, elle est réaliste. Elle fait avec ce qu’elle trouve en face d’elle. Il n’y a plus de Dieu souverain ni d’idées souveraines, quelque chose de plus grand quel qu’il soit, seulement l’humain, le tout petit humain qui a pris conscience de sa bassesse, n’a même plus honte et négocie au grand jour avec. C’est tout.

 

C’est le second coup de poignard dans l’amour immodéré que je porte à mon pays. Moi, descendante d’immigrés italiens, naturalisés à la majorité. Le premier fut porté en 2002. L’élan à 80% cicatrisa la plaie. Elle s’est rouverte avec ce sondage. En 2012, il crève ou il se régénère…