You’ve got a dm…

19 juillet 2012 5 Par Catnatt

Police Dog, Tess, 29/1/35 / by Sam Hood

 

Spoiler : ceci est un billet garanti sans révélations, il est 100% café du commerce. A bon entendeur…

 

Bien…

 

Ca fait un petit moment que je réfléchis aux rapports sur twitter, en particulier sur les dms. Je suis essentiellement sur facebook, mon blog, twitter et je me disais que celui-ci est tout de même un espace à part car ou on est en « public » à savoir la timeline (qu’elle soit publique ou privée) ou on est dans une relation directe avec UNE seule personne (le dm à savoir le direct message ou message privé).

 

De fait, cela donne quand même un tempo très particulier aux relations nouées sur cet espace, accentué par le nombre de caractères limité.

 

Pour recevoir un dm, encore faut-il que vous ayez accepté de suivre la personne. On pourrait dire que le dm par nature est obligatoirement un consentement mutuel entre deux personnes. On ne réfléchit pas à ça quand on décide de suivre quelqu’un. Il ne s’agit pas seulement de voir les tweets de quelqu’un, on accepte de facto le principe d’ un lien privé avec elle, en tout cas la possibilité ( d’une île).

 

A noter qu’une option existe qui consiste à envoyer un message direct à tous vos followers. Autant dire qu’à ce compte-là vous pouvez tout aussi bien publier un tweet public, à la différence près que vous êtes sûr que votre message sera vu par tous. Pour autant, je ne crois pas que cette option soit souvent utilisée. En tout cas, je ne m’en suis jamais aperçue. Et par ailleurs, vous avez le dm en mode automatique, souvent le petit message de bienvenue tellement neutre que vous percutez que c’est une configuration informatique à l’appareil. C’est relativement insupportable, bien que l’intention soit louable, parce que le dm a ceci de spécifique : il ne supporte que le propos particulier.

 

J’ai reçu des dms de toutes sortes. Je ne fais pas partie des filles que l’on drague par ce biais-là (attention, ceci n’est pas l’expression d’un regret ni un appel du pied, que l’on soit bien clair). Finalement, si j’y réfléchis vraiment, cela m’est arrivé deux fois et je dois bien avouer que je ne me suis jamais vraiment remise de ce dm reçu de l’un des deux : « Et moi je te fiste (si si tu adores ça ) »… (Je sais, ça laisse rêveur qu’on puisse envoyer ça après 5 dms échangés et non, je ne dirais jamais qui c’est). Pour le second, la drague s’est très vite déplacée à l’échange de mails.

 

Donc sinon je reçois quoi comme dms ? Les ¾ sont des échanges ponctuels sur un sujet donné. J’ai beaucoup de mal avec les conversations one to one qui se prolongent en public. Je bascule très vite vers le dm parce que je suppose qu’en général, ça n’intéresse personne sauf les concernés. Du coup, un lien se crée fatalement : sur un sujet précis, on a une idée « précise » de la personne. Si ce type d’échanges se reproduit, on peut vite penser – trop vite ? – qu’une intimité existe. (A noter que j’ai un gros faible pour ceux qui suppriment systématiquement leurs dms après l’échange, j’ai l’impression qu’on joue à l’ardoise magique… :p)

 

J’ai commis cette erreur longtemps. Maintenant, je suis suffisamment aguerrie sur twitter pour savoir qu’il n’en est rien : il s’agit d’une intimité factice, du moins, à 80% des cas. Si l’échange ne se déplace pas ailleurs, s’il reste confiné dans ces 140 caractères, vous pouvez être quasiment sûr qu’il ne vaut pas grand-chose ou qu’il est l’équivalent d’une conversation d’un soir au comptoir d’un bar. Pas plus. Pas moins.

 

Si nous sommes tous conscients de nager en pleine extimité sur les réseaux sociaux, dès lors que l’on bascule dans l’échange privé, on a tendance à estimer qu’on n’est plus dans ce champ-là. Je crois que c’est une erreur. Lors d’échanges de dms, on est encore en pleine extimité mais une extimité réduite à un seul spectateur. C’est tout.

 

Si les ¾ des dms que je reçois sont donc plutôt enrichissants, il est une autre sorte de dms qui peut bouleverser l’illusion que l’on est dans une relation privilégiée avec quelqu’un, surtout quand il s’agit de personnes « connues ».

 

Il y a le dm de promo : au début, on ne percute pas vraiment. On pense que l’on est quelque part « élu » par la personne qui nous a estimé « digne » d’avoir accès à cette information (je caricature à dessein). Tout va bien jusqu’au moment où vous vous rendez compte que vous n’êtes pas « unique » – même si vous n’êtes pas en général assez idiot pour penser que vous êtes tout seul hein mais mettons que vous misez sur un comité restreint – mais qu’en fait la personne sollicite des dizaines et des dizaines de personnes en jouant sur le levier de l’intimité (consciemment ou pas, c’est pas le problème) pour que vous diffusiez à votre tour l’information. Evidemment, au bout d’un moment, vous êtes navré ou agacé.

 

Le problème n’est pas tant de vouloir faire la promotion de contenu – on est tous là pour ça – mais de ne pas assumer ce côté promo. Il règne quand même une faux-culterie assez colossale dans ce domaine. Il y en a qui font ça intelligemment : il arrive que je reçoive un dm concernant un article parce que la personne a pensé, de part ce qu’elle sait ou croit savoir de moi, que ça m’intéresserait. Et sur 99% des cas, effectivement, cela m’intéresse et je remercie bien volontiers la personne. Mais pour d’autres, il s’agit d’achat d’ « espaces publicitaires » même pas payés en espèces sonnantes et trébuchantes mais dans un type de monnaie qu’on ne pensait jamais voir : le faux semblant d’une intimité.

 

C’est étrange, non ? Attention, je ne suis pas dans le reproche, je suis dans le constat. Mais c’est quand même étrange quand on réalise ce « phénomène ». (Remarquez, après avoir dit ça, je ne suis plus certaine d’en recevoir encore (de l’art de se tirer une balle dans le pied, grande spécialité chez moi :p).

 

Il y a aussi ce lien un peu bizarre que j’ai noué avec quelqu’un ; ce n’est ni un ami ni un pote ni un inconnu qui n’en a rien à foutre. Le mot le plus juste que j’ai trouvé c’est « soutien ». Nous ne sommes pas intimes, nous ne partageons rien, nous sommes souvent en désaccord, nous avons juste un ami commun, nous ne nous voyons jamais, nous n’échangeons aucun mails. Mais.. Mais quelque part, je sais et il sait qu’on peut compter l’un sur l’autre. J’ai bien vu à quelques dms reçus qu’il était assez réactif quand j’ai besoin de quelque chose et je prends sa défense de temps en temps. Mais cette relation très particulière n’a pu se créer que parce que nous avions, quelque part, un pied dans la réalité de l’autre, à savoir cet ami que nous chérissons tous les deux.

 

Pour finir, il y a l’échange régulier qui ne se déplace jamais ailleurs. A coup de phrases bien percutantes de 140 caractères où l’on se survend fatalement, prenant soin consciemment ou inconsciemment de planquer nos mesquineries, nos défauts lamentables et notre lâcheté incontournable, on finit par arriver à une espèce de relation idéale où l’on serait au maximum de ses capacités en permanence. On croit s’attacher. On croit connaître. On croit que l’on est dans une relation à part. J’ai tendance à penser – sauf si, encore une fois, la relation s’est déplacée ailleurs : vie réelle ou au pire chat ou mails – que c’est une illusion. Une pure illusion. Si vous en êtes conscient, vous maîtriserez parfaitement votre partition et jouerez votre petite musique de chambre en sachant que c’est du vent. Mais si vous n’êtes pas averti, tôt ou tard, la chute sera rude.

 

Les échanges de dm sont des châteaux de sable, aux fondations tremblantes, qui ne durent qu’un temps. On n’est pas amis sur twitter, c’est faux. C’est juste un levier supplémentaire pour rentrer en interaction avec un être humain. Oui, ça n’est que du vent, celui qui vous glisse entre les doigts et ce n’est pas bien grave. Il faut juste le savoir et profiter de ce nouvel espace avec des règles en permanence en construction. L’extimité ne fait que commencer…