Les femmes, « pigeons » de l’humanité. L’affaire Fontenay Sous Bois
Ce billet a été mis à jour à 8h19
Aujourd’hui, le jugement sur l’affaire de viols collectifs de Fontenay Sous Bois a été rendu. Je ne vais pas revenir sur le déroulement de l’affaire, vous trouverez toutes les infos ici ou là.
Je suis plutôt respectueuse des verdicts. Justice n’est pas émotion. Justice n’est pas loi du talion. Pour autant, celui de cette affaire m’a mis mal à l’aise. Comme si le jury en avait fait plus une affaire de symbolique qu’autre chose. L’incompréhension règne. Le contexte n’est pas pour rien dans ce mal-être chez moi : la semaine dernière, j’étais à la #slutwalk (ou marche des salopes) et hier Eric Raoult était en garde à vue pour violence domestique et tenait ces propos ahurissants : « dire à son épouse ‘tu t’habilles comme une salope’, ce n’est pas une violence conjugale ». Accessoirement, 2012 a vu cet épisode surréaliste : L’abrogation immédiate (alors qu’ils pouvaient la décaler) de la loi sur le harcèlement sexuel par le Conseil constitutionnel via une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).
(Note, on m’a reproché de tout mélanger hier soir. C’est possible mais je m’en fous. Si vous contemplez 2012, je me demande comment les jeunes filles ont perçu le message qui leur était envoyé par la société en matière de violences hein…)
Après l’affaire DSK, on pensait qu’il y avait eu une prise de conscience. Il n’en est rien. Mais alors… rien de rien. Les chiffres sont les mêmes 75 000 viols par an, 10% de plaintes. Et aujourd’hui, un jury a décidé qu’une plaignante dans l’affaire Fontenay sous Bois n’allait pas être reconnue comme victime, comme si on pouvait inventer une histoire pareille ou pire être consentante à 16 ans sur « un plan cul » avec une quinzaine de mecs. ALLO ?! SI j’applique les statistiques à cette sinistre affaire, on peut envisager que les deux plaignantes sont les 10% des victimes de viols collectifs par ces hommes et l’une d’entre elle ne fera pas partie des 2% des 10 qui voient leurs violeurs condamnés…
Très sincèrement, je me tape complètement que ces mecs aient refait leur vie, se soient insérés ou Dieu seul sait quoi. Je n’arrive pas à digérer qu’un jury ait pu débouter un être humain sur une plainte pareille. Je n’arrive pas à digérer que la prison avec sursis pour 4 de ces criminels aient été la sanction et que 10 s’en soient sortis. Ha pardon, il y en a un qui a pris un an ferme. Celui qui a buté sa femme ? (Petit lien Le calvaire de Nina ). Ils étaient parfois une cinquantaine à mater. Alors 14 sur le banc des accusés, ça veut dire que ce sont les pires ou ceux contre qui il y avait des éléments à charge)
(Note : Je ne réclame pas la perpétuité pour ces criminels. Mais il y a un seuil entre le sursis (Oh mon Dieu, ils ne pourront pas travailler dans une banque ! ^^) et la perpét. De la prison ferme me semble un bon début quelle que soit la durée.)
Alors autant sur la manif devant chez DSK, je m’étais abstenue. Autant, j’évite soigneusement les manifs féministes politisées. Autant, là je crois que je vais allez à la manif lundi devant le ministère de la justice. Je crois qu’en tant que femme, on ne peut pas laisser faire une chose pareille. Je crois que si un jury en a fait une histoire symbolique, nous devrions nous, femmes vivant en France, en faire aussi un symbole.
Les pigeons sont à la mode. En l’espèce, ça fait des siècles que nous, les femmes, sommes les » #pigeons » de l’humanité. Si des tweets et une page facebook ont fait reculer le gouvernement, j’aimerais qu’on le pousse à avancer dans notre sens. J’aimerais que le ministère de la justice se saisisse VRAIMENT de cette affaire. J’aimerais que le parquet se réveille. Et non, on va pas attendre le 25 novembre.
Si on laisse passer ce verdict, si on ne fait rien, tout le ramdam de l’affaire DSK n’aura servi à rien.
Venez manifester lundi, malgré les associations, malgré peut-être la présence de partis politiques, malgré toute la récupération possible. On s’en fout. Cette fois-ci, je crois vraiment qu’il faut y aller. Justice doit être rendue. C’est un permis de violer effectivement qui vient d’être délivré.
lundi 15 18h30, Ministère de la Justice, place Vendôme.
Bouge-toi, elles c’est nous, nous c’est elles…
(Note, j’ai eu droit aussi hier soir à un laïus comme quoi je mettais tous les hommes dans le même panier. De grâce, les hommes ne sont pas synonymes de violence pour moi. Mais en l’espèce, il est une catégorie d’êtres humains qui pensent que la violence est légitime. Et je ne suis pas sûre que la société les en dissuade finalement. Et puis par ailleurs, mais j’espère que c’est un malentendu, j’ai eu trois commentaires facebook sur trois actus : la petite Malala, le Mali et le résultat positif du Hub Forum. Peut-être que j’ai mal compris mais j’y vois une façon de m’expliquer que je passe à côté des « vrais » combats. Comme disait Valérie CG, c’est jamais le moment et il y a toujours plus important. La théorie de la relativisation sera toujours un frein pour tout ce qui concerne les femmes…) Maj de 10h13, c’était un malentendu pour le dernier point. J’avais mal compris.
Le message envoyé par la Justice sur ces faits graves et inconcevables est déplorable, ne tient pas compte des victimes et crée une sorte d’impunité chez les coupables qui, selon les avocats partie civile, n’ont pas pris conscience de la gravité de leurs actes.
Le système judiciaire sur cette affaire (comme sur bien d’autre) a été fautif. Comment plaider plus de dix ans après les faits. Clémentine Autain hier dans le Grand Journal expliquait parfaitement que pour 5 ou 10 minutes du connard, il y a des années ou dizaines d’années de conséquences pour la femme ensuite.
De plus, nous avons eu la « chance » d’entendre un de ces gars expliquer son point de vue infect, crachant encore sa haine sur ses deux jeunes femmes victime d’hallucinations.
DSK (qui prône sa liberté individuelle, les Call-girls volontaires, et quasiment le droit au viol) est un autre exemple ahurissant. Tu ne mélanges pas tout.
Tous les hommes ne sont pas ceux-ci, je ne me sens pas concerné par tes remarques sur ces déséquilibrés, il n’est pas difficile de faire la part des choses.
Il ne faut pas confondre non plus les droits légitimes de la femme et le féministe (parfois excessif).
Tu ne mélanges pas tout. Comment ne pas insister sur les peines laxistes des violences conjugales, l’absence de protection, etc…
Je ne sais même plus s’il faut plus en vouloir au système judiciaire ou à cette bande de jeunes/à Raoult/etc..
Tu soulèves le problème plus général du respect (dingue qu’il faille le réclamer) des femmes dans la Société française.
Tout alors se mélange, les cultures, les religions, les éducations et l’Histoire.
[…] Cat Natt, Blog «Heaven can wait» […]
Bonjour Catnatt,
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A propos de cet article, paru aussi sur Facebook, Je suis sans doute l’auteur, sur ton FB donc, il y une dizaine de jours, ou l’un des auteurs probables, du » laïus comme quoi tu mettais tous les hommes dans le même panier » , ce qui m’a valu, ce que je déplore, le fait d’y être black-listé, retiré de tes « amis FB » .
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Je le déplore car cela n’est pas faire preuve du sens du débat et de tolérance à la contradiction que de procéder ainsi, mais soit.
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Si j’ai été excessif, je suis prêt à l’attendre dans une discussion, un débat justement, mais que tu me « coupes le micro » cela tendrait à renforcer mon opinion qu’il s’agirait avant tout d’un sujet dogmatique qui ne souffrirait ni la nuance, ni la critique, ni la contradiction.
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Sans doute ce que tu appelles « la théorie de la relativisation » qui « sera toujours un frein pour tout ce qui concerne les femmes » car bien sûr tout ce qui concerne les femmes ne serait être relativisé, critiqué, des détails les plus infimes au cas les plus graves, comme le sujet dont il est question ici, sous peine de l’infamie de la condamnation de machisme qui vous mettrait au banc de la société moderne et civilisée.
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Comme le dit ci-dessus B4rny « Il ne faut pas confondre les droits légitimes de la femme et le féminisme (parfois excessif) »
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Et ce sont ces excès généralisateurs que j’ai eu l’outrecuidance de critiquer, comme je le disais sans doute dans mon message sur FB ( mais je ne sais plus, puisque tu l’as sans doute effacé, en tout cas je n’y ai plus accès ) je me trouve dans la position similaire, toutes proportions gardées, au social-démocrate russe du siècle dernier qui émettant des réserves sur les interprétations excessives du stalinisme, s’est vu condamné au mieux à l’exil au pire au goulag sous l’accusation de révisionnisme ou pire de trahison, de pacte avec l’ennemi, ou encore d’être l’ennemi même (remember l’Aveu de Costa-Gavras).
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C’est cette forme de déviance totalitaire de la pensée, à partir d’un cause juste et de son universalité, qui voudrait s’imposer à tous, partout et en toutes circonstances, sans nuances, sans « relativisations » qui me fait craindre pour le débat démocratique, pour la justice qui n’appliquerait pas à la lettre les mots d’ordre des ultras sans discussions possibles.
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Quand les victimes ou du moins leurs plus fervent(e)s défenseurs et avocates veulent se transformer en procureurs au bras vengeur, favorables à condamner collectivement « pour l’exemple » sans grandes considérations des preuves et des faits, des responsabilités, que cela m’inquiète des excès et de l’évolution non démocratique des combats, fussent-ils aussi justes que celui-ci.
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« A mort, à mort » criait le bon peuple autour de la guillotine sur les places publiques, avant que l’on ne supprime tardivement la peine de mort. N’as-t-on pas dit alors que sa suppression était dès lors « un permis de tuer » ? faudrait-il la rétablir pour ces crimes les plus odieux ?
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J’ai eu l’impression que l’on retrouvait les mêmes excès dans le débat médiatique et émotionnel, forcement, qui a entouré ce procès. là est sans doute ma très grande faute hérétique, la faute d’avoir mis cela en perspective, d’avoir « relativiser » comme si je niais les faits et la souffrance des victimes.
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Donc voilà, je suis près à en discuter, à moins bien entendu que l’infamie qui me touche n’empêche que l’on m’adresse désormais la parole 😉