Parfois, je ne sais pas. #Snowden #Mediapart

Photograph of a large crowd assembled on the South Lawn of the White House for the lighting of the National Community Christmas Tree
Le propre des gens comme moi, très actifs sur les réseaux sociaux, c’est d’avoir une opinion sur tout et n’importe quoi. On est pour. On est contre. Et quand on ne sait pas, rarement, on fait soigneusement l’impasse, on ne dit rien.
Parfois, je ne sais pas (et je reste plantée là). Remarquez, je pourrais le garder pour moi mais hier soir, j’ai manifesté mon absence d’opinion sur l’affaire Mediapart.
Ca m’a chiffonnée parce qu’il n’y a pas qu’au sujet de Mediapart que je ne sais pas. Il y aussi l’affaire Snowden.
Concernant Mediapart et la décision de la cour d’appel de Versailles d’exiger le retrait des conversations « Bettencourt » sous peine de sanctions financières, je suis partagée. D’un côté, si Mediapart n’avait pas diffusé, il n’y aurait jamais eu d’affaire et pourtant l’éclatement de celle-ci me semblait, semble nécessaire. Mais pour autant, la méthode employée me pose problème. Ceux qui crient à la censure (et je rappelle que c’était déjà cette décision qui avait été prise par la cour de cassation en 2011) font du deux poids deux mesures, il me semble. Parce que cela touche les puissants et parfois des personnes qui avaient beaucoup à se reprocher, tout devient légitime. Mais le droit ne travaille pas à la tête du client. Le majordome a enregistré pendant un an (pour de bonnes ou de mauvaises raisons, peu importe) et Mediapart (et le Point) ont diffusé. La mécanique, c’est quelqu’un, n’importe qui, vous enregistre à votre insu, fournit l’enregistrement à un média qui le publie et continue de le faire des années après. Et si ça vous arrivait ? Est-ce que le contexte suffit à justifier la méthode ?
Entendons-nous bien, je n’ai pas d’avis. Mais je trouve que ceux qui crient à la censure vont un peu vite en besogne et à contrario que ceux qui s’en réjouissent s’asseyent sur la liberté de la presse. Je n’attends pas de réponse spécialement aujourd’hui mais Mediapart a fait quand même sa spécialité de ce genre de moyens. Ca pose question si ce n’est que ça pose problème. Ca mérite mieux que des hurlements dans un sens ou dans l’autre, ça mérite réflexion.
L’affaire Snowden obéit exactement au même genre de mécanique. D’un côté, un homme décide de faire son job de « citoyen ». Puisque l’Etat (avec un grand E général et absolu) ne daigne pas jouer la transparence, il est du devoir de certains d’éclairer le grand public. Mais quid de la raison d’Etat ? Je suis très sensible à cette notion. Il est totalement illusoire de penser qu’un pays peut fonctionner sans elle. Pas de diplomatie, pas d’accord commercial bénéfique pour la nation, plus de secret défense, plus de lutte contre le terrorisme etc (je ne suis pas une spécialiste hein…). Où commence et où se termine l’exigence de transparence ? Mieux, où commence et où se termine la dictature de la transparence ? Encore une fois, je n’ai aucun avis. D’un côté, j’applaudis la démarche de Snowden, je la trouve nécessaire, je n’ai aucune envie qu’il aille en prison ou pire. Mais de l’autre, un pays peut-il fonctionner sans côté obscur de la force ? Et quelles sont les limites de l’exercice ? A partir de quel moment on estime que l’Etat va trop loin, trop intrusif, trop « totalitaire » et à contrario peut-on espérer être correctement défendu (dans tous les domaines) par un gouvernement que l’on limite fatalement par une exigence de transparence absolue ?
Je crois qu’il n’y a pas de bonnes réponses. Les contours de ce que peuvent s’autoriser « les puissants » et les gouvernements sont en train d’être redéfinis par un nouvel environnement lié principalement à internet. Ils apprennent en même temps que nous, j’imagine. Rien ne sera plus jamais comme avant.
Et ça a parfois un côté terrifiant… Ce qui s’appliquera à eux s’appliquera fatalement à nous.
« Le propre de gens comme moi, très actifs sur les réseaux sociaux, c’est d’avoir une opinion sur tout et n’importe quoi. On est pour. On est contre »
tu es optimiste pour ceux qui parlent à tort et à travers
J’en fais parfois partie Romain 😉
Je reste perplexe sur les décisions sans pour autant m’indigner. Après, ce qui s’est passé est tout de même important.
Lecteur de médiapart, que je soutiens activement, le jugement m’a paru sévère, mais la justice doit être indépendante et la procédure n’est pas terminée. La Cassation donnera une décision peut-être différente, mais cela reste une décision de justice. Les articles datent de 2010, l’affaire Bettencourt est lancée de toute façon avec des mises en examen à l’arrivée. La contrainte par citation avec une grande somme peut couler Médiapart et le Point ( car il y a Le Point aussi ) mais ils retireront leurs articles et liens audio/vidéo.
C’est une censure suite à une décision de justice, pas suite à un décret quelquonque d’un Poutine ou Berlusconi au pouvoir par exemple. Attendons donc la suite
Pour Snowden, qui a lancé l’alerte sur Prism, je suis plus dubitatif car là, cela reste du domaine de l’éxécutif. Que n’aurait-on dit si Sarko avait fait ça ? C’est une vraie question. Ce qui m’a le plus géné dans cette histoire, c’est l’avion de Morales bloqué, président élu (dont je me fous cordialement ne connaissant rien de sa politique) hagard dans l’aéroport de Vienne, pendant que la police fouille son avion. (dans le JT de France 2 mercredi soir) et il déclare « je ne comprends pas, je ne suis pas un bandit ».
Ca, c’est choquant. Vu passé un article du Soir, disant qu’aucun chef d’état n’avait bloqué un avion présidentiel depuis 1945 montre la gravité du geste. Je n’ai rien contre la raison d’Etat, mais si cela ne sert que pour couvrir des saloperies ( ex Karachi) là il y a un vrai soucis pour moi. Après que Valls soit à l’ambassade US jeudi, pour ensuite une heure plus tard lancé un communiqué refusant le droit d’asile peut être discuté/débattu. Chacun peut avoir un avis différent. Mais tout ça, il n’y a rien de glorieux à en tirer.
Sur l’avion présidentiel bolivien, je suis carrément d’accord avec toi Olivier.
Par contre sur l’emploi du mot « censure » je ne peux pas l’être parce qu’en l’espèce de ce que j’en comprends il ne s’agit pas tant de censurer Mediapart mais de rappeler qu’il existe en France une notion très forte de la protection de la vie privée.
C’est pas pareil
Autrefois, seuls « spécialistes » médiatisés (philosophes télévisuels, Attali, Séguéla, Minc, etc.) avaient le droit d’avoir un avis public sur tout et n’importe quoi. Nous autres, pauvres péquins, pouvions au mieux espérer que les bêtises que nous disions atterriraient dans les oreilles de Jean-Marie Gourio et finiraient leur carrière dans un de ses recueils de brèves de comptoir.
Internet nous a offert à tous un innombrable public potentiel. Et c’est bien. Pas la peine de se demander pourquoi Finkielkrant, Séguéla, et beaucoup d’autres sont à ce point anti-Internet.
Sinon, pour les deux cas évoqués plus haut, je peux donner mon avis, aussi : Mediapart a bien mené une enquête et ses révélations ont eu un retentissement politique important, c’est curieux de le censurer à présent.
Pour Snowden, j’ai une opinion plus tranchée : les démocraties se protègent de manière parfois opaque, oui, mais ceux qui le révèlent sont dans leur droit, à moins de mettre en danger quelqu’un (effectivement, si on donne l’adresse de la maman de l’informateur, on est carrément dangereux). La manière dont Manning, Assange ou Snowden sont traités ne rappelle pas tellement les démocraties telles qu’on aimerait qu’elles soient, mais plutôt les Mafias, impitoyables envers celui qui a parlé.
Ha je vais pas être d’accord. En tout cas pas sur l’ensemble.
Assange et wikileaks n’ont pas hésité à publier une version non expurgée des docs à l’origine de la grande médiatisation de wikileaks. Ils se sont amusés aussi (et c’était pas les seuls) à publier la version intégrale des pieces du dossier Dutroux. Alors qu’entretemps des enquêtes avaient été menées et des éléments du dossier ont été considérés comme nuls ou erronés.
C’est dangereux.
Snowden, c’est autre chose.
Je parlais de censure suite à une décision de justice, parce que dans le droit européen, ( qui jouera au final) la jurisprudence est très claire la dessus (vie privée oui, affaire politique au final donc public) ce qui n’est pas tout à fait pareil.
Je mets suppression de l’article suite à décision judiciaire, si tu préfères 😉
(souffle sur ses ongles)
« Ouais, je préfère, vu que je suis juriste du café du commerce »
MOUHAHA
Merci votre honneur 😀
Je ne compare pas les trois questions, juste le traitement qui en est fait par l’administration US : un acharnement manifeste et parfois hors cadre légal. Wikileaks a effectivement publié des informations dangereuses pour certains, du moins on l’a dit (pas de drame répertorié), mais ils ont au moins admis que c’était une erreur. Mais bon, il ne faut pas oublier non plus ce qu’ils ont amené – par exemple un épilogue à l’affaire du journaliste de Reuters dont on a finalement su qui l’avait assassiné. Enfin quoi qu’on leur reproche, Snowden est dans un tout autre cas.