« C’est beau, je sais… »
Je mastique en boucle le verbe « considérer ». C’est ce que je fais en cas de crise : mastiquer les mots jusqu’à les vider de leur substance. Je suis en tête à tête avec ce mot, je le regarde la tête penchée sur le côté, je l’observe, je le toise, je tourne autour comme un lion en cage et je connais par coeur ses synonymes. J’ai mastiqué en 2005 « Ca va pas le faire » jusqu’à la nausée avec « la ritournelle » en boucle. J’étais trop intense (« C’est beau, je sais »).
J’ai mâché d’autres mots d’autres illusionnistes, j’ai trituré un autre mensonge et broyé les précédents. Les miroirs aux alouettes m’offrent toujours leurs reflets, c’est une boucle permanente, un mouvement perpétuel. Aujourd’hui, « l’amour naissant » comme une suite et je suis toujours trop intense. Je n’aime que les portes entrouvertes, celles que je ne pousse jamais vraiment jusqu’au bout et si l’on m’oblige à pénétrer, si je m’oblige, je suis toujours déçue (« C’est beau, je sais »).
Victoria dit que Lacan postulait : »Je n’aime pas le malentendu alors je le nourris ». Je n’aime pas le mensonge alors je suppose que je le nourris. Il faudrait que je comprenne pourquoi le mensonge est la grande affaire de ma vie. Pourquoi les uns après les autres, écrivez-vous le grand livre de l’illusion ? Et pourquoi est-ce que je vous regarde faire ? Il ne faudrait jamais s’approcher de trop près de peur d’apercevoir le mensonge naissant. Faire le deuil d’une histoire qui n’a jamais existé avec quelqu’un qui vit ; faire le deuil d’une histoire qui a existé avec quelqu’un qui n’a jamais vécu. Toutes les combinaisons possibles de la chimère (« C’est beau, je sais »).
Tu n’étais ni mon ami ni mon amoureux, tu étais mon allié. Quoique je fasse si je me retournais tu étais là, mais une fois la porte entièrement ouverte, moi dans la pièce et toi en face, tu étais une ombre. On considérait et j’aimais. J’aimais et j’étais regardée attentivement, examinée et tenue en compte. Tenue en laisse au bout d’un mensonge. Je rêvais évidemment, on manipulait les ficelles, deux mains légères en mouvement. On nous aura fait courir la créature et moi. (« C’est beau, je sais »).
Je crois que c’est ça l’histoire : les êtres considèrent pendant que moi, j’aime ; fatalement je reste trop intense. Pendant qu’ils restent à distance, je continue de tourner sans fin au sein de la grande roue de l’émotion ; je ne m’épuise pas, il y a toujours l’impulsion. Malgré moi. C’est pour ça que j’aime Sébastien Tellier : des boucles hypnotiques que j’enchaîne jusqu’à ce que le calme revienne. J’aime les musiques d’obsession (« C’est beau, je sais »).
J’aimais et toi, tu considérais.
Je reste toujours trop intense.
C’est beau l’illusion, je sais…
L’illusion est belle, c’est finalement la seule certitude que j’ai.
Euh… C’est beau tu sais. 😉
On est qqzunes, comme ça … à vivre DANS le malentendu, qu’on nourrit comme des illusionnées qu’on est. Puis on prend une grande claque, on est très fière quand même parce qu’on n’est pas tombée dans le mensonge, et on repart pour un tour, en boucle. C’est incurable. Mais c’est beau, je sais.
« et on repart pour un tour, en boucle. C’est incurable. Mais c’est beau, je sais. » <3
Merci à vous deux
Et si cet appel visait quelque part, je dis bien quelque part, à te rassurer, rassure toi : je taime. C’est simple, je sais.