La mélasse
Une période insatisfaisante. Voilà comment je qualifierai ce que je vis en ce moment. Rien, absolument rien ne fonctionne de manière fluide ; c’en est désespérant.
On notera l’ironie : écrire sur le bonheur tout l’été et enchaîner l’automne dans une ambiance à la con, frustrante et fatigante. Je pleure. Je pleure beaucoup trop souvent en ce moment et je ne sais distinguer ce qui est de l’ordre d’un genre d’épuisement – je crois que je flirte avec le burn-out – et ce qui tient de la déprime. Si je devais noter une amélioration, c’est que grâce à quelques personnes, je ne me sens plus seule à crever. C’est pas mal, mais insuffisant. C’est compliqué et même dans ma tête ça l’est ; tout se mêle, rien ne se finit, tout stagne, rien ne s’arrange, tout flotte, rien ne s’illumine.
Point zéro.
Alors, nous connaissons tous des périodes comme ça, oui, des périodes de flottement, ça suppose une gestion de l’inertie ou quelque chose comme ça. Je ne me souviens pas avoir connu telle chienlit, il y a toujours une part de violence larvée ou tangible qui génère un mouvement mais là pas vraiment. C’est plat et chiant.
Je ne sais pas comment faire.
Mon système ne fonctionne plus.
Ma manière de négocier avec le monde passe par ici, par ces terres, le blog, la catharsis, écrire pour soi et publier pour le partage, certes, mais surtout parce que ça oblige une tenue, une réflexion, un recul. Je tiens parce que je tente de rester toujours en mouvement et que je m’arrête ici. Sauf que les problèmes qui me préoccupent en ce moment et dont tout le monde se tape ne peuvent pas exister de manière frontale ici. End of the game.
J’ai une liste de problématiques, elles s’accumulent et je ne stabilobosse (oui je sais, ce verbe n’existe pas) rien. Or, je suis une maniaque de la méthode Jacques Chirac détournée : on fait une liste et on stabilobosse quand on a fait. On ne raye pas, parce que quelque part, ça anéantit ce qu’on fait, ça ne souligne pas l’effort, c’est comme si on avait rien fait, en plus d’être inesthétique. Stabilobosser, c’est mettre en exergue, c’est se féliciter. Et je déconne pas tant que ça.
Mais bref, une liste de choses à régler dont je ne peux pas me débarrasser ici. Or mon système marche parce que je me sens extrêmement vite encombrée à l’intérieur et que je viens sur Heaven pour déposer le trop plein. Pour ne pas oublier non plus – ce qui concerne généralement mes enfants – mais surtout ce blog fait office de hammam émotionnel. La comparaison est hasardeuse, mais il y a de ça, incontestablement. Pour l’instant, je me trimballe une tonne de toxines et je ne peux pas m’en débarrasser.
Parce que ça concerne une procédure et le père de mes enfants et que mine de rien, je fais attention.
Parce que ça concerne un secret et que cela supposerait que j’assume certaines choses et comprenons-nous bien, ça ne me dérangerait pas plus que ça (enfin, si, un peu, mais comme dit Olivier « écris quand ça devient gênant ». Il a raison, c’est bon, je vous assure !) , mais disons que ça pourrait déclencher des réactions consternantes que je n’ai pas envie de gérer. Ou une parano en moi.
Parce que je suis tellement fatiguée que j’ai pas la force d’aller au carton. J’en meurs d’envie pourtant. Pas assez d’énergie, ce ne serait pas raisonnable.
Parce que ça concerne aussi le boulot et que mine de rien, j’applique ici quelque chose qui ressemble au devoir de réserve.
Parce que, parce que, parce que.
Alors, je fais comment, moi, pour gérer une mélasse pareille ? Comment je cesse d’être empêtrée ? Peut-être qu’il faut apprendre à rester immobile. Peut-être qu’il est temps. Temps aussi d’accepter le manque d’énergie sans se débattre. Peut-être qu’il faut lâcher prise.
Le voilà, le maître mot, ma défaite, mon apprentissage : lâcher prise ; mon impuissance, mon impatience. C’est quelque chose qui m’est tellement étranger. Lâcher prise, faire ce qu’il y a à faire mais en étirant le temps. Ralentir. Lâcher prise et ralentir sans le subir ; en le savourant. De la patience.
Chaque période est riche d’enseignement (ça c’est pour côté Paulo Coehlo), même les plus dégueulasses, même les plus absurdes, même les plus ineptes. Et si toute cette période a du sens, c’est bien sur le lâcher prise.
Merci beaucoup, ça m’a fait beaucoup de bien…
Tu as trouvé toute seule la réponse. Lâcher -prise. Accepter quand cela ne va pas, regarder frontalement la chose, l’observer sans se débattre avec elle. Un célèbre moine zen vietnamien dit; qu’il faut entouré la douleur de tendresse comme une mère avec son enfant. Soit donc tendre avec toi . Rien ne dure, pas même les périodes de mélasse , cela finira par passer . Sabrina M