baiser ou ne pas baiser, telle est la question ? Vraiment ? #FREE
J’étais là en train de boire des verres de blanc en compagnie d’une amie et d’une relation, j’étais là et on en était au stade où un verre d’eau aurait été franchement une bonne idée.
J’étais là et on parlait sentiments puis sexe et la question est arrivée, parfaitement dans le contexte.
-Mais ça fait combien de temps que t’as pas baisé ?
J’allais répondre que ça ne regardait personne, mon amie a répondu à ma place. Je suis restée estomaquée et je n’ai rien dit. C’était un mensonge et j’ai laissé faire ; par lâcheté probablement, par gêne, parce que je ne me voyais pas revenir sur ce qu’elle avait affirmé et répété par deux fois.
La relation a trouvé ça que ça faisait longtemps, trop longtemps ?
Dans le taxi qui nous ramenait toutes les deux, elle m’a dit, enfin je ne sais plus comment elle m’a sorti tout ça, mais bref que j’étais pas assez légère, trop sérieuse. Ne vous y trompez pas, j’aime mon amie, je sais que tout ça est bienveillant de sa part, mais on peut tourner autant de temps qu’on veut autour de tout ça, je suis hors normes pour elle, elle a l’impression qu’elle doit voler à mon secours en soirée, en quelque sorte me rendre plus digeste.
J’ai appelé Isabelle dès que je suis rentrée chez moi. J’étais effondrée, très bourrée et effondrée. J’ai trouvé ça dingue d’avoir menti à ma place, j’ai trouvé ça fou qu’on en soit arrivé à ce stade-là et je me suis demandée combien de personnes autour de moi au courant du rythme de ma vie sexuelle (autant dire très peu) avaient potentiellement menti à ce sujet lorsqu’ils parlent de moi.
En fait pour être très honnête, j’ai failli je ne sais pas combien de fois écrire sur ce sujet : pas forcément pour me répandre en détails qui n’intéressent personne, mais parce que c’est un sujet. Je me suis toujours retenue parce qu’il était hors de question qu’on plaque ce prisme sur mon comportement. Je suis convaincue que les gens sont suffisamment abrutis pour expliquer des attitudes qui les dérangent chez moi avec cette explication :
Enfin on a compris pourquoi elle est comme ça, elle ne baise pas assez ou plus ou pas suffisamment.
En gros
Elle aurait bien besoin d’un bon coup de bite.
Allez, soyez honnêtes, combien de fois l’avez vous sorti en vous marrant ? Pour info j’étais déjà une emmerdeuse et une hystérique quand j’étais très très active donc je crains que ça ne change rien à l’affaire malheureusement. De plus, je me faisais traiter de salope à ma grande époque et en quelque sorte de « freak » à présent : vous remarquerez que finalement ça ne va jamais.
Reprenons. Quitte à parler de ma vie sexuelle, autant parler de mon passé à ce sujet : je me suis beaucoup beaucoup amusée. C’est simple les statistiques (2015) font état de 9,5 partenaires sexuels pour une Française dans sa vie. Bon…J’ai explosé les scores, c’est 8 fois plus à peu près, je vous laisse faire les comptes. J’ai été en couple sur une période de 3 à 5 ans avec 3 mecs, et sur une période d’un an avec 3. Le reste ? Grosso modo des débuts d’histoire qui déchantent, des coups d’un soir ou des sex friends. J’ai été très libre et je n’ai pas hésité à raccompagner gentiment à la porte certains mecs le lendemain matin. J’ai adoré baiser pour baiser, j’ai consommé comme un mec puisqu’on barbote en plein clichés sur ce texte.
Et puis la machine s’est enrayée. Il y a eu mon dernier ex qui m’a laissée exsangue et écoeurée de toute relation amoureuse, il y a eu un coup d’une après-midi dans une chambre d’hôtel qui m’a laissée nauséeuse, ne sachant pas pourquoi j’avais trouvé que c’était une bonne idée.
C’était quoi le plan et qu’est ce que je voulais exactement ? J’avais la quarantaine et j’allais me comporter exactement comme je me comportais il y a 20 ans ? Le ridicule ne tue pas, mais bon là, franchement… Je trouvais ça pathétique – en fait pour être très claire, je ne pose aucun jugement sur des femmes de mon âge ou plus qui « consomment du sexe ». Absolument aucun. C’est juste que ça ne me convient plus parce que fait, refait, encore refait. Je tenais à être précise, je ne veux surtout blesser personne, ça n’est absolument pas l’idée – donc refaire ce que j’ai déjà fait ? Pourtant, la norme de l’hygiène sexuelle planait au dessus de moi comme une épée de Damoclès ou plutôt la balance du jugement. Inscris toi sur des sites de rencontre ! Ça me gave, désolée.
Et le temps a passé. Et j’étais là et on a menti à propos de ma vie sexuelle. J’en suis là. Si je ne veux rencontrer personne (et c’est faux) je me dois d’avoir une vie sexuelle. Le problème c’est que j’ai une vie sexuelle, elle est entre moi et moi et je me colle au plafond à l’envie (je ne ressens aucune frustration, merci beaucoup). Mais ça n’est pas suffisant vraisemblablement, ce qui compte c’est la présence de l’autre. Je me baise, mais il faudrait que quelqu’un me baise pour ne pas subir potentiellement le jugement et l’analyse de mon comportement. Sans l’autre, point de salut ? Ou alors c’est moi qui intègre tellement les injonctions implicites de la société que je me débats avec et que dès lors que je croise un regard de surprise, je me sens remise en cause dans mes choix.
Ce que je veux ? Une relation qui ait du sens. Est-ce trop demander ? Et si ça prend du temps, dois-je m’envoyer en l’air avec le premier venu parce que soi disant moins on le fait, moins on en a envie ? Qu’est-ce que je dois faire pour rester digeste aux yeux des autres ? Réviser mes ambitions à la baisse ? Parce qu’on ne sait qui a décrété que passé tel délai ça devient malsain de pas coucher ? Et c’est quoi le délai exactement ? 3 mois ? Un an ? 3 ans ? 15 ans ? À quel moment on te décrète urgence sexuelle ? Il faudrait peut-être que je mente à tout le monde : j’ai couché avec un mec sur tinder, c’était très bien, mais il est con. Et hop, tranquillité à peu de frais.
Mais comment je fais pour vivre dans ma vérité ? Faut-il que je la travestisse pour que ça reste digeste pour les autres y compris mon entourage proche ? Je vois d’ici les félicitations : ha ben voilà ! Tu vois que c’était pas si compliqué ! Et puis tu vas forcément finir par tomber sur un mec bien ! Faut consommer un minimum pour trouver le produit de l’année. Combien de plans foireux dois-je me taper pour qu’on entende mon point de vue ?
Sophie Fontanel a écrit « L’envie ». Elle a dit :
« Pendant une longue période, qu’au fond je n’ai à coeur ni de situer dans le temps ni d’estimer ici en nombre d’années, j’ai vécu dans peut-être la pire insubordination de notre époque, qui est l’absence de vie sexuelle. »
La pire insubordination. Elle a raison. Dans une société où on t’explique que tu peux baiser avec n’importe qui, que n’importe quelle déviance à partir du moment où elle est actée entre adultes consentants est recevable, l’insubordination sexuelle, à savoir ne pas avoir de relations sexuelles avec autrui, est un des pire trucs que tu peux mettre sur la table. Ce blog, c’est ma table des négociations. Alors le voilà le pire truc (avant le prochain). Je l’ai fait et je le ferai encore tant que je ne serai pas dans ma vérité. On est libre de faire ce qu’on veut, mais pas de se retirer du jeu, ça c’est bizarre ! Il est fort probable qu’on trouverait moins étrange un mec qui aime se faire pisser dessus par exemple ou une nana qui aime lécher des chaussures. À l’heure actuelle, ça interroge moins, vous voyez ? (Grand bien leur fasse ceci dit). Combien de personnes à cet instant précis sont en train de mentir au sujet de leur vie sexuelle parce que ça ne se fait pas de ne pas consommer ? Volontairement s’entend. Pourquoi est-ce si choquant ? Parce que la société vous offre la liberté sexuelle sur un plateau et que c’est sacrément gonflé de pas en profiter ? Puisqu’on te dit que t’as la permission !
Que projettent les gens dans cette histoire ?
Si on doit analyser mon comportement un jour, on y trouvera un élément fondateur : ma liberté. Je suis prête à payer le prix fort pour ça, mais on n’entamera pas ma liberté, enfin ce que je mets dedans. Et en l’espèce mes choix.
Je ne veux plus pleurer, ça non, je ne veux plus pleurer. C’est un choix. J’ai trop pleuré. J’élimine toutes les raisons les unes après les autres qui me font pleurer si ce n’est de joie ou d’émotion devant une oeuvre ou ce qui est inévitable comme la mort d’un proche un jour ou l’autre. Je ne veux plus pleurer, c’est simple et non négociable. Ce qui ne l’est pas non plus c’est de partager mon quotidien avec un homme. Ça c’est niet aussi. Je ne veux plus baiser avec autrui si je ne suis pas dans un réel élan (bon ça suppose pas une demande en mariage après hein… Élan équivaut à attirance, excitation, pas love at first sight obligatoirement)
Je ne dirai pas le temps, je ne dirai pas les détails si vous me posez des questions. Mais ce billet est un soulagement. Écris quand ça devient gênant dit Olivier. C’est extrêmement gênant, mais j’en ai marre de porter ce truc là comme un problème. Ça n’en est pas un pour moi, tant pis si ça l’est pour les autres. FUCK OFF ! Peut-être que c’est le dernier truc punk qu’on peut faire si on y réfléchit bien… Je veux être libre et écrire sur ce sujet, c’est récupérer ma liberté. Plus jamais personne ne mentira pour me sauver de l’indigeste. En écrivant, j’en fais un non sujet.
Après, je le dis avec beaucoup de conviction, il reste un espace immense où tout est possible.
Je veux bien être amoureuse, je veux bien rencontrer quelqu’un. Je veux l’élan et le coup de coeur, je veux l’amour et le sexe, le rire et l’allégresse, je veux la complicité et la tendresse.
Je ne veux pas courir après pour autant. Ça viendra quand ça viendra. Je ne suis pas incomplète parce que je suis célibataire et que je n’ai pas de relation sexuelle avec autrui. Et je ne veux plus jamais me retrouver comme cette soirée à pleurer comme une madeleine parce que je ne suis pas comme il faudrait que je sois selon des critères qu’au fond, personne n’est capable de justifier.
Je suis là et entière. Libre.
« ’cause you’re free
To do what you want to do
You’ve got to live your life
Do what you want to do »
(je vais m’acheter un boa)
La libération sexuelle a transformé le sexe en un élément de réussite sociale. Là réside cette pression, les critères attendus.
Qui trouve-t-on chez ceux qui ne baisent pas ? Les puceaux tardifs, les timides maladifs, les trop moches, les trop gros(ses), les bizarres, des frigides coincées, des romantiques ou des religieux ringards, des dégoûtés/traumatisées d’expériences passées non-résolues, des handicapés, et des vieux tout seuls qui n’ont plus tout à fait le même physique, la même libido.
Si on n’a pas baisé depuis longtemps, quelque chose ne doit pas tourner bien rond. Libérez-vous sexuellement, le sexe sans sentiment et sans se jurer fidélité devant Dieu, c’est enfin permis. Et puis la science prouve que les corps en ont besoin, ça détend. Oui… et ça peut être pas mal, quand on en a envie, mais si on préfère le réserver à une relation profonde où se couplent six autres choses, cela ne serait pas encore mieux ?
Le rapport au sexe est personnel, et voué à évoluer au fil des expériences. Qu’importe votre sexualité, vivez-la comme vous la ressentez, comme vous en avez envie au moment S, tant qu’elle n’est néfaste ni à vous-même ni à d’autres. La norme, les critères, laissez-les sur le pas de la porte et ne les pleurez plus. C’est, en finalité, bien plus épanouissant.
Magnifique plaidoyer en faveur de la liberté sexuelle, quelle que soit la forme qu’elle prenne…
S’il est bien un domaine où personne ne devrait avoir à se justifier ou à rentrer dans une case c’est certainement celui-ci…
Continuez à faire les choses comme vous le sentez et… fuck à ceux qui vous jugeraient pour ça! !!
Qu’on te laisse tranquille sur le sujet nom d’une pipe !
Je ne l’aurais pas mieux exprimé…sinon quand on « ose » en parler, il y a le fameux » non mais tu me faisais marcher hein? C’est pas possible, tu peux me le dire hein que tu as des plans, c’est normal.une femme tellement blablablablabla… » pfff.ff et là on est perdue entre la honte et la paix avec soi-même qu’on avait.Tout simplement… incroyable!
Faire ce qu’on veut, comme on veut, comme on le sent, s’écouter, se préserver, se respecter. Dans tous les sens du terme.
Take Care…