Je suis le prince charmant (I can’t help myself)
Un échange de texto avec un mec et pour des raisons qui nous regardent, je lui envoie un gif de Blanche-Neige qui saute dans les bras du prince charmant, en l’espèce la situation est inversée, c’est lui la princesse et soudain je me suis dit :
C’est moi le prince charmant.
Ça a toujours été moi.
Et d’ailleurs, pourquoi dans les conventions actuelles est-on tenu de rajouter « charmant » à prince ? C’est curieux non de devoir préciser ? Pourquoi ? Ça sous entend quand même qu’ils ne le sont pas fatalement charmants alors que les princesses, elles, elles le sont tout court, la panoplie est complète. Saviez-vous que ce qualificatif apparaît dès lors que Disney s’en mêle : « C’est dans la version de Walt Disney de Cendrillon, sorti en 1950, qu’apparaît le nom de « prince charmant », qui s’est popularisé depuis et généralisé à tous les princes de contes dans l’imaginaire collectif, même s’il est absent des autres films d’animation de Disney« * Curieux qu’on ait eu besoin de préciser cela au moment où les femmes avaient commencé à travailler en masse.
Mais bref, j’ai réalisé que j’étais, je suis, je serai le prince charmant si je dois me définir comme un archétype. On dit souvent que les femmes sont atteintes du syndrome de l’infirmière, on soigne, on sauve. Donc je ne comprends pas comment on a pu se faire arnaquer à ce point-là sur le sujet. Si nous sauvons, portons secours, rescousse, cela fait de nous le prince charmant, non ?
Ironie du sort, je suis de plus en plus entourée par des femmes qui portent la baraque à bout de bras : Ce sont elles qui font bouillir la marmite, gèrent, prennent en charge, héros – et j’ai laissé sciemment au masculin – du quotidien et plus je creuse ce postulat, plus je suis convaincue que ce sont elles les princes charmants.
Quel tour de force ! Réussir à inverser les rôles dans l’imaginaire collectif.
Et quand on y pense, faire de cette qualité – l’impulsion du sauvetage – quelque chose de négatif, trop sensibles, trop émotives, trop empathiques finalement alors que c’est précisément une qualité si c’est un homme – le prince charmant- c’est fort. Les femmes s’impliquent et c’est précisément ce que fait le prince sinon il passerait son chemin en disant c’est pas ma merde, elle a qu’à continuer de pioncer la connasse, ce que font, on est tous d’accord là dessus non, ce que font la plupart de nos congénères.
« Oh, oh, I can’t help myself
Something comes over me
Baby, whenever you are around »
Et si je retourne à mes amours, l’histoire est toujours la même : un homme dans une situation bancale, malheureux, que je ne peux m’empêcher de sauver, du moins comme une tentative, à qui je sers de béquille, qui s’appuie sur mon cheval blanc tant est si bien que je finis par sombrer. Est-ce la fin cachée des contes de fée ? Est-ce qu’Aurore finit par rincer son prince ?
Je suis désolée de le dire, mais j’ai vu plus de femmes porter secours que d’hommes. J’imagine que si j’étais un homme, j’aurais autant de contre exemples, mais ce postulat, nous serions les princes charmants, est le temps d’un texte très amusant à observer (je ne prétends pas ici faire un billet abouti)
Surtout il change la donne : le regard que je porte sur moi vole en éclat ; je ne me suis jamais vue en princesse, trop brutale et j’aurais adoré être comme Grace Kelly ou Audrey Hepburn, vous savez, délicate, discrète, parlant d’une petite voix charmante (!), mais ma came et mon tempérament c’est plutôt Catherine, Catherine Hepburn et si je retourne l’histoire et que je m’envisage comme un prince charmant, soudain, tout ce qui me faisait défaut devient inutile et encombrant.
Ce qu’on m’a reproché souvent, mon père me traitait souvent de petite soeur des pauvres, mais qu’aurait il dit si j’avais été un homme ? Mon fils tu es chevaleresque ? Aurait-t-il été plus fier de moi ? Moins encombré ? C’est très intéressant de se poser cette question sans toutefois avoir de réponse définitive. Le fait que je ne peux pas m’empêcher de me sentir impliquée dès lors que quelqu’un ouvre la bouche n’est plus une déficience, mais une noblesse et vous savez quoi ? Je prends !
Si nous sommes les princes charmants et que les hommes sont finalement des princesses (excusez-moi hein, mais un mec malade c’est la princesse au petit pois 😉 ), les contes de fées sont encore une fois à proscrire ou à réécrire. Je n’ai jamais vraiment lu ce genre d’histoires à mes enfants et Dieu merci, ma fille a plus biberonné Mulan que Blanche-Neige. Cela génère tout un fantasme chez les uns et les autres irréaliste, qui nous fait prendre les pieds dans les tapis des histoires d’amour et des chimères et surtout si j’ai raison c’est une arnaque totale. J’ajoute à ça le coup magistral d’avoir réussi à postuler que les femmes sont chiantes alors que désolée de le dire encore une fois, pour ce que j’en vois les comportements erratiques, donc comportements de chieurs hein… se retrouvent bien plus chez les mecs que les nanas.
Et si le coup de force du patriarcat avait été d’inverser les rôles pour prendre le pouvoir et nous faire croire que nous sommes des princesses fragiles nécessitant un secours alors que c’est l’inverse qui se produit factuellement ? Cette littérature plante des graines dans nos cerveaux d’enfants, nous cherchons ce qui n’existe pas et pour cause, c’est là, sous nos yeux, à chaque fois que nous nous croisons dans le miroir : c’est nous que nous recherchons. On pourrait imaginer que les hommes cesseraient de se scruter tentant et échouant bien plus souvent qu’ils ne le souhaitent, tentant d’être à la hauteur de cette injonction. Peut-être que tout irait mieux, on ne sait jamais.
Et si nous sommes les princes charmants de l’histoire, nul besoin d’avoir peur de la solitude, nous sommes en excellente compagnie le temps de trouver, peut-être, notre princesse.
‘Cause nothing else can satisfy me
Oh, oh, I can’t help myself
Something comes over me
Baby, whenever you are around
moi j’adore, j’ouvre okazou, et paf, y’a un texte tout chouette tout neuf.
Beezoo Catherine ;))
oh j’avais pas vu ton commentaire !!
Plein de bises Cee 🙂