Simone, Andrée, Charlotte et les autres
Une fois n’est pas coutume, je ne suis pas là pour ricaner sauvagement des erreurs de mes congénères ; non, cette fois-ci, c’est pour les saluer.
Il y a longtemps, Canal plus. Simone Veil. J’ai beau être de gauche, j’adore Simone Veil, son chignon, son look imperturbable… Une femme exceptionnelle au destin qui l’est tout autant. Elle a publié ses mémoires « Une vie » et quelle vie ! Bien sûr ses combats, bien sûr survivre à l’horreur, bien sûr sa carrière politique ; la victoire de la liberté de choix, la loi sur l’IVG et la contraception. Se rend-on vraiment compte de ce que nous devons à cette femme ? Une révolution, une vraie : ne plus être esclave des circonstances. Choisir. C’est important de pouvoir choisir.
Ma fille regarde. Du moins, pour être honnête, je lui demande de regarder et d’écouter parce que c’est important. Son expression incrédule face à la date du droit de vote des femmes. Que si, elle, Charlotte a le droit de faire des études, c’est parce que d’autres se sont battues avant.
Et je lui parle de sa grand-mère. Ma mère, décédée il y a 20 ans. La liberté des femmes était un combat important pour elle. Ma mère a travaillé longtemps, dans les années 70, au CIF, Centre d’Information Féminin. » L’histoire de ce réseau commence par la création, en janvier 1972, d’un Centre d’Information Féminin ( C.I.F.) à Paris, placé sous l’autorité du Premier ministre, à la suite des États Généraux des Femmes (Versailles 1970) qui avaient conclu à l’urgence du développement d’une politique publique d’accès aux droits pour les femmes ». Et il y avait tant à faire. Avec sa copine Françoise, ma mère a dépensé une énergie folle à aider les femmes. Non seulement, elle a énormément bossé mais je la soupçonne aussi d’avoir beaucoup ri ! Ma mère a commencé Sciences Po, tout quitté pour suivre son mari à Madagascar, recommencer des études, être prof de latin et de français, rentrer en France, recommencer, CIF, changer encore, Éducation Nationale.
Informer. Éduquer.
Je raconte à ma fille sa grand-mère et je me rends compte que c’est comme si je lui parlais de Marie-Antoinette, un personnage. Elle ne la connaîtra jamais. Alors je lui reparle de ses combats, il en reste à mener. Simone Veil a raison : « ce qui manque aux femmes, ce sont les réseaux. Les hommes se téléphonent, se parlent, s’entraident, les femmes pas assez » . À nous de créer cette dynamique. À Charlotte de continuer. Je lui parle de sa grand-mère, belle, brillante, drôle, intelligente ; une merveilleuse amie.
Ma mère aurait probablement adoré mes copines, des filles formidables, imparfaites mais formidables. Comme Simone ; comme ma mère. J’essaye d’en être digne et j’espère que ma fille mettra ses pas dans ceux de sa grand-mère.
Parce que le combat continue !! Simone ? Si tu m’entends !
Maj du 30 juin : Simone Veil est décédée. Elle ne nous entendra plus. Charlotte avait 8 ans quand j’ai écrit ce petit texte. C’était il y a presque dix ans.