La bourgeoisie de province
Soyons clairs, j’en fais partie quelque part. Mais j’ai passé ma vie à essayer de gommer cet aspect de ma personnalité et surtout à la fuir en courant !
Je suis née à Lyon. En terme de bourgeoisie, on peut pas faire mieux. Cependant, ma prestation lyonnaise ne dura qu’une année pour attérir cent kilomètres plus loin. Pire, quoi. Quatorze années. Puis direction l’Ardèche. Pas loin de la ville de mon enfance, autant dire que ça équivalait à la même chose.
Alors, c’est quoi la bourgeoisie de province et en quoi se distingue-t-elle de la parisienne ? La première est résolument conservatrice, autant que la seconde. Sauf que la seconde se noie dans des km2 et que vous pouvez parfaitement l’éviter. Demain, à Paris, vous pouvez parfaitement décider de ne plus voir votre entourage et vous en fabriquer un autre, tout propre, tout neuf. En province ? Mission impossible !
Tant que tout se passe bien et vous rentrez dans le rang, c’est la dolce vita. On va chez les uns, chez les autres. Dès qu’il y a un problème, tout le monde se rue dessus et projette ses frustrations, ses problèmes, ses angoisses. Ça juge. Ça condamne. Ça se fait. Ça se fait pas. Ma première expéreince en la matière, c’était à l’enterrement de ma mère. Exposée au premier rang, devant afficher ma douleur profonde, je devais une prestation à la hauteur des espérances malsaines de la petite ville. Naïvement, je me suis conduite librement. Je n’ai pas pleuré. J’ai consolé mon amie, en larmes. Je me suis levée pour rejoindre mes potes au fond de l’Eglise et je me suis même piquée un fou-rire. Fatale erreur.
Je n’aimais pas ma mère, j’étais une moins que rien, blablabla. J’ai passé l’année et demi qui a suivi a trouvé le moyen de me barrer rapidement de cette prison étouffante. Je l’ai fait. Direction Paris.
J’ai replongé sept années plus tard dans la bourgeoisie bordelaise, cette fois-ci. Une bande de descendants d’anciens esclavagistes protestants. Voilà ce que c’est. Entendons-nous bien. Il existe des gens formidables au sein de la bourgeoisie de province. Mais dès qu’ils sont en groupe, ils sont effrayants. Les bordelais, les hommes en particulier sont des machos de première. Ça épouse des filles bien, ça baise des putes en Espagne. Magnifique… J’ai reçu des francs maçons chez moi, j’ai servi à bouffer à tout la high society de cette putain de ville, je sais de quoi je parle. Ça cancanne. Ça médit. Un sport local. On vomit son ennui dès qu’on peut.
Courage, fuyons… Retour à Paris. Je pourrais être tranquille mais mon mec habitant la province, bien forcée de me taper de manière indirecte ses potes ou son entourage. Ou mes copines qui se sont barrées de Paris, et qui hallucinent sur le comportement de leur entourage de province. Beurk. On oublie trop souvent de signaler aux parisiens en mal de campagne qu’ils vont devoir se taper Mme Vrélard et ses remarques quand ils décident de partir à l’aventure, loin de Paris. Dans le tas, et ce sont les pires, il y a les anciens parisiens convertis à la vie à la mort à la vie de province. C’est un peu comme les convertis sur le tard à une quelconque religion, ils sont hystériques. Encore une fois, il y a des gens bien dans le lot. Des gens mesurés qui ne se jettent pas sur le moindre ragôt. Mais ils sont rares. Le reste ? lls se font tellement chier dans leur univers étriqué qu’il faut bien trouver des occupations.
Pourquoi je m’énerve sur le sujet ? Parce que j’ai ma copine que j’adore est en train de traverser des évènements un peu particuliers. Chaque faux pas est vécu comme un 11 septembre dans une petite ville. Quand elle me raconte, j’ai des envies de terrorisme provincial. Ces petits bourgeois de province, donneurs de leçons, j’ai envie de leur mettre ma main dans la gueule, de leur claquer leur foulard hermès dans la tronche, leur Zadig et Voltaire quand c’est branchouille, ou leur burberry quand on atteint des sommets.
Je les ai en horreur. Plus ça vieillit, plus c’est intolérant. Plus le temps passe, plus ça s’accroche à des principes à la con. Ca se dit bonjour à chaque coin de rue, ça crache à la suivante. Le règne de l’hypocrisie. Alors vous me direz dans un univers aussi restreint, ya que l’hypocrisie qui peut faire tenir tout ce bordel. Je le conçois. Mais bon Dieu ! Que c’est pénible.
En fait, si je réfléchis bien, je n’ai qu’un mot à dire sur le sujet.
J’emmerde la bourgeoisie de province.
Bonjour,
Je viens de lire votre post qui me fait un peu peur c’est vrai. Je suis un émigré récent de Paris sur Nemours , 90 km, j’ai 67 ans, suis retraité depuis 2 ans et j’ai une page sur FB : Chez Yo. L’adaptation au monde provincial, même á si peu de distance de la capitale , est un peu difficile car pour moi, c’est un peu le trou du cul du monde avec dèsert médical (je commence à être un peu vieux et ça se déglingue) , èglise et château médiéval en prime, Madame le maire de droite, les commémorations et ses bourgeois ploucs en bonus qui se la jouent Cartier et Chanel ( du faux ?) avec une condescendance naturelle ( « Si vous voulez entrer au club de bridge , je pourrai vous introduire…Introduire, quelle familiarité madame !!!) . Je me suis installė ici il y a 4 mois pour une femme avec qui je ne sais pas trop si je vais rester et parce que j’en avais un peu marre de Paris oú j’avais l’impression d’avoir tout vu en 67 ans. Je constate finalement que j’ai fait une connerie mais ce n’est pas la première alors…Mais basta des tribulations de Yo à Nemours (quelle tristesse). Je tenais simplement á vous dire que j’aime beaucoup le ton de cet article et du reste de votre blog sur lequel je me suis un peu balladé. Je me ferai un plaisir de recevoir vos prochaines parutions. Á bientôt
Yo
J’avais oublé de vous conseiller le film de Jean Pierre Darroussin: » Le pressentiment » qui parle un peu de cela au sein même de la capitale.