Policement vôtre

25 février 2010 0 Par Catnatt

Arrests in Food Price Riots, St. Quentin. France (LOC)

Mais que fait la police ? Ou plutôt qu’arrive-t-il à la police ?

 

Les incidents se multiplient : des gardes à vue surréalistes à base de gamines menottées, d’avocate plus que fouillée, des délits de faciès, de la politique du chiffre, de la violence à l’égard des sans papiers, le malaise de cette institution est de plus en plus palpable.

 

Revenons aux origines : le mot « police » vient du grec ancien « polis » qui signifie « cité » « ville ». En France, elle arrive avec la révolution : « La définition actuelle a été établie par les acteurs de la Révolution française. Ainsi, l’article 12 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 affirme : « La garantie des droits de l’homme et du citoyen nécessite une force publique ; cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux à qui elle est confiée ». (Source wikipédia)

 

Je situe le divorce entre l’opinion publique et la police dans l’oubli de la définition qui lui donna naissance. « Pour l’avantage de tous ». Il semblerait que, du moins, c’est mon avis, la police soit devenue uniquement une manne à pognon. Je comprends que la sécurité routière soit une priorité. En moyenne un peu plus de 4000 tués par an. Mais on ne me fera pas croire qu’il n’y a qu’un objectif de sécurité publique. Les objectifs fixés de contraventions deviennent de plus en plus délirants. L’Etat a besoin d’argent. Il faut remplir les caisses vides. Au final, un flic doit être rentable. Est-ce compatible avec la notion de force instituée pour l’avantage de tous ?

 

Parallèlement à tout ça, nous avons la politique de reconduite à la frontière. Ça coûte 20 000 euros à chaque fois en moyenne (Centre de rétention, frais d’éloignement, monopolisation de forces de police pour la reconduite, l’exercice des droits, prise en charge sanitaire et sociale) ; Dernier exemple en date : les 32 Marocains reconduits au Maroc alors… Qu’ils rentraient au Maroc. (Voir ici ) . Je m’empare de ma petite calculette : 640 000 euros. Pour l’année 2005, on a dépensé 20 000 X 20 000 (Remarquez, ça fait des chiffres assez simples du coup…) soit 400 000 000 millions. C’était juste pour info. En sachant que beaucoup de sans papiers travaillent (Parfois même pour Matignon, c’est drôle, non ?) et payent des impôts, ça fait des trous dans les caisses. Mais là, n’est pas le sujet. On demande encore du chiffre et du chiffre aux policiers, appliquant une politique qui déplaît à la majorité de la population, qui coûte un pognon monstre pendant qu’on leur demande de remplir de l’autre. C’est quasi kafkaïen, ce trip.

 

Mais je pose encore la question : où est dans tout ça « l’avantage de tous » ?

 

Je pars du postulat, certes naïf, que ce qui prime c’est l’être humain dans une société civilisée. Donc la défense de celui-ci dans le cadre de la police (J’évoque cette institution mais par extention, je mettrai la gendarmerie dedans aussi. Définition : La gendarmerie est une force armée chargée de missions de police parmi les populations civiles). Je comprends qu’on fasse grand cas des cambriolages et des crimes organisés, mais je suis décontenancée par le peu de considération que l’on puisse porter sur l’une des plus grandes horreurs de notre joli pays : Les violences faites aux femmes. Pour rappel, une femme tous les deux jours, voire tous les jours les années fastes, meurent sous les coups de son compagnon ou autre énervé du genre. 2010 est l’année du combat contre ces violences. Soi disant. Je soupçonne pourtant une opération de communication bien que la future loi sur la notion de harcèlement moral au sein du couple soit incontestablement, une belle avancée.

 

L’année 2010 démarre bien avec une histoire exemplaire de la situation, celle de Tanja. (voir ici). Edifiant exemple de l’utilité du combat de l’année. Tanja, celle qui est morte assassinée et dont le père avait enlevé son enfant, le sien par la même occasion. Cette femme a déposé je ne sais combien de mains courantes auprès du commissariat. Rien n’y a fait. Elle a alerté le Maire de sa commune qui, à son tour, a averti le Préfet. Dans le vide. Mais où était donc la police ? Occupée à quoi ? C’est trop compliqué de recevoir une plainte ? Les sms n’étaient pas assez éloquents ? Ou la police était-elle occupée à faire bien autre chose ? Comme ce gendarme qui a recueilli cette fois-ci la plainte d’une jeune marocaine tabassée à coups de fer à lisser par son propre frère et s’est empressé de la dénoncer aux autorités compétentes parce qu’elle n’avait pas de papiers. Voir ici

 

Pour info « Victime, cette jeune femme devient coupable et subit plusieurs incarcérations à Montargis et Casablanca. Son frère n’a pas été sanctionné pour les traitements inhumains qu’il lui a fait subir. Les gendarmes n’ont pas été sanctionnés pour avoir détourné leur mission. Le préfet du Loiret n’a pas été sanctionné pour avoir passé outre les droits de Najlae. »

 

Le gouvernement piétine notre déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Je répète. « La garantie des droits de l’homme et du citoyen nécessite une force publique ; cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux à qui elle est confiée ».

 

LA GARANTIE DES DROITS DE L’HOMME !!!!

 

Est-ce que ce gendarme zélé a eu l’impression de respecter ce qui fait le socle de notre nation ? Est-ce que tout cela a un sens encore aux yeux de nos policiers ? Est-ce qu’on leur signifie leur mission première qui n’est pas de protéger un état mais des individus, des hommes, des êtres humains ? C’est bien là la cause du divorce entre la police et la population. Ils protègent un système. Un système de plus en plus agressif.

 

Mais ils sont aussi victimes. Car on ne leur laisse pas le choix. l’Etat français est géré comme une vaste entreprise avec les licenciements qui vont avec, des « licenciements » sociaux, des gens qui sont de plus en plus borderline, des humains en dehors de tout système et la police qui va avec, une force répressive garante de la productivité de chacun.

 

Il est probablement là le malaise de cette utile institution : on leur demande mal et sans moyens d’appliquer une politique de rentabilité de l’être humain au sein d’une société. Résultat ? Ils coffrent pour rien des petits branleurs qui ressortent comme ils sont rentrés et pendant ce temps, ils n’ont plus le temps de protéger des gens qui ont vraiment besoin d’aide. Parfois, les deux se croisent. Le petit branleur qui fanfaronne de s’être fait relâcher par la police rentre chez lui. Et trouve sa mère morte.

 

« Nous sommes dans une société où les pizzas arrivent plus vite que la police. »

[Claude Chabrol]

Je crains que nous n’ayons un problème dans ce cas-là…

Crédit photo Flickr