Itinéraire politique d’une enfant trop gâtée #présidentielles2012 part 1

26 février 2012 53 Par Catnatt

 

Election night crowd, Wellington, 1931 Photographer: William Hall Raine

 

Here I am, ma carte d’électrice à la main – je mens, je l’ai perdue il y a des années – un peu perdue, un peu nase (dans cette boîte de jazz) au milieu de cette campagne présidentielle 2012.

 

Je précise d’entrée de jeu que mon spectre politique se situe à gauche, donc amis de droite, je ne parlerai pas de ce qui se passe de ce côté-là. Ou à peine.

 

Il y a quelques mois, le chemin vers cette élection était pavé de fleurs, de paillettes et de petits poneys violets flottant dans le vent de l’air du temps. Dominique Strauss-Kahn était le messie de la gauche, il était l’évidence, il était l’avenir. Mon aventure (!!) avec DSK avait commencé en 2007 lors de son pacte de l’Elysée, discours que j’avais beaucoup aimé. Autant dire que je suivais avec joie et enthousiasme le mouvement en 2011. Oui, il n’était pas vraiment de gauche, social-démocrate jusqu’au bout des ongles, mais peu importe, il me semblait être l’homme de la situation.

 

Je ne vous cache pas que mes projets ont été quelque peu contrariés un certain jour de mai 2011.

 

J’ai mis du temps à réaliser que j’étais orpheline politique. Oh je vous entends d’ici, mais enfin comment peut-on être aussi conne ? Faire le deuil est parfois plus compliqué qu’on ne l’imagine. Les espoirs insensés ne se laissent pas tuer d’un titre de journal aussi facilement.

 

Mais en septembre, il faut bien se résoudre à la triste réalité. Et la primaire socialiste se profile. Premier tour, je vote Montebourg, parce que la 6e République est un concept auquel je crois fondamentalement. Il y a bien le revenu universel qui est aussi quelque chose auquel je crois de tout mon coeur mais ce n’est pas le credo du PS. Il est à noter que je me suis fait quasi insulter à la sortie du vote par une mère de famille de l’école parce que j’ai eu le malheur de dire que je n’avais pas voté pour Ségolène Royal. Ha les ségolénistes ne vont pas me manquer… Donc Montebourg au premier tour.

 

Je ne vous cache pas que mes projets ont été quelque peu contrariés un certain jour d’octobre 2011.

 

Deuxième tour entre Martine Aubry et François Hollande. Arf. J’hésite. J’hésite entre la solidarité féminine et le raisonnable. J’hésite parce que je trouve que Martine Aubry est combative et convaincante mais elle a cette réputation épouvantable qui lui colle aux baskets. J’hésite parce que François Hollande me semble manquer de caractère mais je ne me fais aucune illusion, la France n’est pas prête pour une Présidente. Je vote François Hollande.

 

C’est un genre de win, mes projets ne furent pas contrariés.

 

Me voilà en octobre 2011 en train d’hésiter entre #EELV et le PS. Sauf que certains évènements vont déstabiliser ce choix réduit.

 

Je n’envisage pas le NPA ni le Front de gauche. Le NPA me semble manichéen dans son raisonnement, j’ai du mal à croire en l’extrême gauche comme une solution. Et puis on ne passe pas de DSK à Poutoux en trois pas de danse, faut pas déconner non plus. Melenchon ne me plaît pas du tout. C’est un truc un peu bête, un truc d’électrice qui réagit de manière émotionnelle mais lorsque j’ai vu Melenchon apostropher un journaliste (enfin je crois) le pointant du doigt et lui disant « Ferme ta bouche ! Ferme ta petite bouche !», il m’a rappelé mon ex-mari. C’est une réaction viscérale de rejet.

 

Je n’envisage plus François Bayrou. Trop seul. Je ne vois pas comment il pourrait former son gouvernement, trop d’incertitudes pavent son programme. Exit le centre.

 

Europe Ecologie les Verts est représenté par Eva Joly que j’apprécie beaucoup. J’aime ce qu’elle représente de manière fondamentale : la justice. Pour autant, j’ai du mal avec ce mouvement qui me semble très désordonné. Je suis pour l’écologie – qui est contre ? – mais je crois en une négociation en douceur avec la réalité de notre monde et ce projet à long terme.

 

François Hollande, dans son discours d’investiture, va me précipiter dans les bras de EELV…

 

Je cite : « La victoire, elle se fait au premier tour et donc j’appellerai, sans risque de pouvoir être contredit et sans volonté d’écraser je ne sais quel parti partenaire, j’appellerai à voter tous les électeurs, qui veulent gagner l’élection présidentielle, à le faire dès le premier tour. Parce que, c’est là que nous aurons l’avance la plus forte, si elle est là, c’est là que nous assurerons notre présence au second tour. Je n’oublie pas, et gardez-vous surtout de cette illusion, je n’oublie pas le 21 avril. » (cf mon billet ici)

 

Le chantage ne fonctionne absolument pas sur moi. Pis, j’y suis réfractaire. Donc, fin octobre, bye bye le PS. Bonjour EELV.

 

Je ne vous cache pas que mes projets ont été quelque peu contrariés un certain jour de novembre 2011.

 

Les salades – il n’y a pas d’autres mots pour qualifier ce qui s’est passé – entre le PS et EELV mettent à mal ma certitude politique. Le claquage de porte de Yannick Jadot, les manœuvres de Cecile Duflot, la faux-culterie du PS, et surtout le recadrage de Eva Joly (voir mon billet ici) vont tellement m’énerver que pour la première fois de ma vie, je ne sais absolument pas pour qui je vais voter. Pour des partis de gauche, le si bien nommé par le Canard Enchaîné, le « On n’échappe pas au verdict du tiroir-caisse » m’écoeure.

 

Je suis paumée. Je regarde les gesticulations politiques avec un peu de dégoût, je ne suis pas loin du « tous pourris », mais je résiste encore, j’ai conscience que la politique compromet fatalement.

 

Avec tout ça – le temps passe tellement vite quand on s’amuse – nous sommes au mois de janvier 2012.

 

Eva Joly est inaudible, elle n’est même pas vraiment supportée par son parti ; s’ils n’en ont même pas vraiment envie, à quoi bon les suivre ? Je n’attends plus grand-chose de François Hollande. Je ne suis même pas le discours du Bourget. Et puis, il y a cette vidéo. Même pas celle du show, juste une petite vidéo tournée dans les coulisses du Bourget après la prestation. Hollande a la grâce ce jour-là, il incarne quelque chose, il rassure, il a l’air de savoir ce qu’il veut. Je rebascule dans les bras du PS.

 


EXCLU : LATÉLÉLIBRE COINCE HOLLANDE AU BOURGET par latelelibre

 

Je ne vous cache pas que mes projets ont été quelque peu contrariés un certain jour de février 2012.

 

Le 21 pour être précise. Le jour du vote du #MES (mécanisme européen de stabilité) Voir mon billet ici. Le PS va inventer un nouveau concept : l’abstention offensive et dynamique. Je vous renvoie au discours de François Hollande nous sommant de voter pour lui dès le premier tour. Je me demande si en 2002, on n’a pas eu droit à une abstention dynamique et offensive…

 

Ca s’appelle du foutage de gueule. Le PS vient de brouiller son discours : on veut bien de ce mécanisme mais pas qu’il soit lié à une rigueur européenne budgétaire. Alors moi, c’est pareil, voyez, je veux bien du contrat génération mais je ne veux pas de la poursuite du nucléaire en France. Donc, je vais m’abstenir, c’est ça ? La politique n’est faite que de choix impossibles et il faut bien trancher.

 

Le 23 février, c’est le jour du débat Melenchon / Marine le Pen. Le premier est calme, efficace, drôle, percutant. C’est une révélation pour moi, d’autant que j’ai trouvé judicieux de ne pas aller sur le terrain de l’immigration mais sur celui de la place des femmes dans le programme FN. Je n’aime pas Melenchon vindicatif. Bien que l’on m’ait expliqué à plusieurs reprises que c’était une technique pour exister dans les médias vu que ceux-ci sont très friands de ce genre de démonstration de force. L’histoire avec le Petit Journal m’a prodigieusement agacée. Pour autant, j’envisage pour la première fois de voter pour le Front de Gauche. J’aime bien le nom de son programme « L’humain d’abord ». Parce que ça manque cruellement d’humanité cette campagne présidentielle.

 

Entre les frémissements de la campagne au printemps 2011 et maintenant, il y a eu la crise. Les cures d’austérité européennes. Les marchés virulents dont on sait qu’ils n’hésitent pas à spéculer sur la faillite des Etats, voire de leur propre pays. C’est ahurissant. Le libéralisme a atteint son seuil critique, il est en roue libre et l’un de ses pères Adam Smith s’est planté. « L’homme intérieur » dans sa grande majorité est incapable de sympathie. Ce n’est pas la peine d’espérer de la droite qu’elle mette réellement un frein à ce dérèglement généralisé. Elle ne l’a pas fait en dix ans, elle ne risque pas d’être éclairée par la fée Humanité demain…

 

Aujourd’hui, nous sommes le 26 février 2012. Je ne sais toujours pas pour qui je vais voter. Un vote est toujours émotionnel. Jusqu’à présent, mes réactions l’ont été. Il est temps de vraiment se pencher sur les programmes, ce que je m’attacherai à faire ici même. Mais cela reste insuffisant. Le programme de François Hollande est ce qu’il est mais l’attitude de ce dernier me laisse dubitative. Je ne suis pas convaincue qu’il va l’appliquer. Ou qu’il va pouvoir l’appliquer.

 

Je refuse de voter utile cette fois-ci. Ca fait dix ans que ça dure, et c’est une année de trop. Peu m’importe les sondages, je voterais pour celui ou celle dont le programme lié à un comportement cohérent arrivera à me convaincre.

 

Et vous ? Vous en êtes où ?

 

Je ne saurais trop vous suggérer cette tribune dans Télérama de Bernard Stiegler. Voir ici