Ma fille, l’internet mondial et la 1664…
Ce matin, j’ai reçu cette missive par mail :
« Objet : Pauvre fille, la honte !!!
Toi, tu te dis Punk, pauvre fille. Moi je me bats pour mes convictions et je SUIS FIERE D ETRE PUNK, une petite Kpon.
C’est quand qu’ on se la met??? Moi, vraie Punk!!! j’ ai honte de ce que tu marques alors viens petite bourgeoise Bobo je t’ attends, moi fille et petite-fille de Viticulteur. Je vais te massacrer, tu as honte de tes convictions???
Pauvre Fille vive la Société de Consommation.
Envoies moi un Email je pourrais pas venir jusqu’ à toi car moi je suis Rmiste et Mère célibataire (La Crise a tuée mon Couple).
Connasse, encore ce qui est vrai dans ton texte c’est que l’ on est contre la Société de Consommation et toi???
E… de C… (16 comme 1664) »
Comment dire…
Première chose, tenter de comprendre ce à quoi ce mail fait allusion, à savoir mon billet « Punk is dead ». Je ne comprends pas trop pourquoi cette jeune fille s’est mise dans un état pareil pour ça, mais apparemment on n’est pas dans le rationnel.
J’aurais pu laisser tomber, mais ma fille de 12 ans était à côté. Je lui lis le mail, nous ricanons en chœur et puis, nous en discutons. L’occasion était trop belle de lui faire une démonstration sur internet. Je voulais lui faire comprendre que l’anonymat absolu est rarissime sur le web, et à moins d’être une bête techniquement (ce qui suppose, entre nous, qu’on a autre chose à foutre le samedi matin que d’envoyer un mail d’insultes et de menaces), on se fait toujours choper.
Il m’a fallu 3 minutes pour trouver son blog. Il m’a fallu trois minutes de plus pour la retrouver dans des commentaires de sites. 3 minutes supplémentaires pour trouver son prénom, son nom, et son facebook. Et trois autres pour trouver le nom et le numéro de téléphone de ses parents. La gamine n’était pas spécialement maligne, entre l’adresse mail, le pseudo et une info piquée dans le mail, ce fut une promenade de santé. Tout ça sous l’œil épaté de ma fille (j’avoue, c’est jouissif et ça assoit, en quelque sorte mon autorité parentale :p). Et de lui expliquer que l’on doit se comporter sur le net comme dans la vie. Toujours se poser la question de savoir si l’on peut assumer les propos que l’on tient derrière un ordinateur et que tout se sait un jour, fatalement.
Je souhaitais enfoncer le clou. J’ai une sainte horreur qu’on me menace par ailleurs. Ceux qui me suivent depuis longtemps le savent, je ne me laisse jamais faire, avec plus ou moins de succès, il faut le dire. Mais le principe est là.
J’ai donc appelé les parents. La gamine s’avère être une adulte de 30 ans, mère d’une petite fille de 5 ans, loin d’être une punk, absolument pas rmiste, vivant aux crochets de ses parents qui s’arrachent les cheveux apparemment. Une jeune femme paumée. J’ai dialogué avec le père pendant 10 minutes, non pas pour lui expliquer que sa fille était une connasse mais pour lui démontrer que sa fille n’allait vraisemblablement pas bien, au vu de ce que j’ai pu trouver sur le net à son propos. Son père est un agriculteur qui a bossé 12 heures par jour toute sa vie, à la retraite, et qui est désemparé. J’ai tâché de calmer le jeu mais in fine, ça ne me regardait pas tellement. Ce que je voulais, c’est que ma fille assiste à la conversation.
Nous en avons longuement discuté. A ce moment-là, j’ai repéré un tweet rappelant l’attaque d’Anonymous envers Facebook qui devait avoir lieu aujourd’hui. C’était un fake mais j’ai embrayé avec facebook et le fait que tout ce que l’on fait sur internet laisse une trace ; qu’ils devront apprendre à protéger leur vie privée.
Je crois que ma fille a compris certaines choses aujourd’hui. Je le reconnais, sur le dos d’une jeune femme pas bien dans sa peau ni dans sa vie. Mais après tout, avant d’envoyer un mail de ce type, il faut réfléchir à deux fois et je pense que le message est passé et chez elle, et chez ma fille, et c’est bien là, l’essentiel.
David Abiker le martèle, il est contre les « écrans » en général et le web en particulier pour ses enfants. Je respecte sa position mais ce n’est pas la mienne. Globalement, j’estime que mon rôle est de rendre mes enfants autonomes et de leur fournir les outils nécessaires pour naviguer en ce bas monde. Internet en fait partie et s’il envahit déjà nos vies, je n’ose imaginer ce que ce sera dans 10 ans.
Je tente d’enseigner à mes enfants comment se comporter dans la vie, qu’elle soit réelle ou virtuelle. Du moins ma façon de voir les choses, qu’ils peuvent remettre en question d’ailleurs. Je tente d’apprendre à mes enfants une certaine déontologie et certaines armes. Parce que les deux sont nécessaires.
Et surtout à ne pas boire de la 1664…
[…] Ma fille, l’internet mondial et la 1664… | Heaven can wait […]
Et bien je suis entièrement d’accord avec votre conclusion.
Notre rôle de parents est d’enseigner, d’apprendre à nos enfants comment se positionner dans la vie, comment éviter certains écueils, comment échapper à certains pièges…
Autant je suis souvent en phase avec ce que dit David Abiker, autant sur ce coup je marque mon désaccord.
Interdire l’accès aux écrans, au web revient à créer une pseudo réalité aseptisée qui n’est pas la vraie vie.
Tôt ou tard, la réalité du monde réel s’imposera à nos enfants, qu’on le veuille ou non.
Et justement, être parent c’est avant toute chose préparer un enfant à être ado puis adulte, et cette préparation passe par l’enseignement, le tutorat, les commentaires et les analyses de ce que la vie apporte de positif et souvent de négatif.
Masquer la réalité (à partir d’un certain âge bien sûr) c’est ne pas assumer notre rôle, c’est cesser cette préparation indispensable.
Masquer la réalité c’est montrer une route sans véhicules, une arme sans munitions, un carnivore sans dents… C’est certainement rassurant et esthétique, mais c’est stérile…
@Yorgeul
chacun élève ses enfants comme il l’entend 🙂
La vie a fait que mes enfants ont été responsabilisés très tôt (trop tôt ?) et que je me vois mal faire machine arrière, ce serait faux cul et destabilisant pour eux finalement.
Mais ceci dit, cela fait partie de mes convictions profondes que mon rôle essentiel est de rendre mes enfants autonomes en suivant leur rythme. (Ne pas aller trop vite est essentiel). Pour moi les rendre autonomes, c’est les aimer, et le monde est si rude…
Sinon, je respecte la position de David Abiker, le truc étant que nous inventons actuellement et personne ne sait, qui de David, qui de moi aura raison (si tant est que l’on puisse avoir formellement raison sur ce genre de sujets)
Quoi que l’on fasse, quels que soient nos choix éducatifs il y aura des répercussions. Et des bonnes et des mauvaises 😉
Comment t’as déchiré !!!! Trop la classe.
@Vinvin
Tain j’encadre ton commentaire dans ma cuisine !! :p
Le jour où les gens comprendront qu’il faut faire attention à ce qu’ils font, ce qu’ils disent et ce qu’ils montrent sur Internet, on aura tous fait un grand pas en avant.
Bravo en tout cas pour cette démonstration.
De toute façon, de la 1664, ils en boiront bien assez tôt une fois l’âge bête venu 😉 Quand à ta démarche face à ce… manquement de courtoisie (!), je dis respect 🙂
J’avoue ne pas avoir compris un broc de ce que cette demoiselle disait dans son mail. Si non je plussois sur cet article, il faut approendre a nos enfants a se servir d’internet et contrer cette idée d’anonymité virtuelle sur le web.
De toute façon, de la 1664, ils en boiront bien assez tôt une fois l’âge bête venu Quand à ta démarche face à ce… manquement de courtoisie (!), je dis respect
+1
Bonjour
Je m’interroge. En quoi donner une leçon in vivo de « savoir vivre » à sa fille justifie de mettre dans l’embarras un vieil agriculteur à la retraite ?
J’imagine que vous avez du mettre les formes pour ne pas trop paniquer le papa.
@PascalR
non non, je lui ai dit que c’était un gros con qui avait mal élevé sa fille….
Plaisanterie mise à part, c’est écrit dans le texte… « J’ai dialogué avec le père pendant 10 minutes, non pas pour lui expliquer que sa fille était une connasse mais pour lui démontrer que sa fille n’allait vraisemblablement pas bien, au vu de ce que j’ai pu trouver sur le net à son propos. Son père est un agriculteur qui a bossé 12 heures par jour toute sa vie, à la retraite, et qui est désemparé. J’ai tâché de calmer le jeu »
Après on peut ne pas être d’accord avec ma démarche. Mais je l’ia fait et je ne le regrette toujours pas à ce jour.
Et en ce qui me concerne, je préfererais qu’on me prévienne si ma fille disjonctait sur le net.
Pas vous ?
Vu sous cet angle je suis d’accord vous, la lecture du billet me laissait penser à une « bonne » opportunité de donner une leçon de savoir vivre à sa fille.
ha mais j’assume totalement le côté leçon de savoir vivre à ma fille. Mais c’est pas parce qu’on donne une leçon qu’on est obligé de mettre dans l’embarras un vieil agriculteur à la retraite.
Et puis… je rappelle à l’origine que la responsable c’est celle qui a envoyé le mail d’origine, hein…
La punk qui a écrit la lettre d’insultes elle a l’air de manquer d’amour.
J’ai envie de la sauter pour faire une bonne action.
Puis-je avoir ses coordonnées.
Peut-être que cette personne voulait simplement vous faire une blague énorme ?
Avez-vous eu des nouvelles suite à votre appel ?
heu…
Non ce n’était pas une blague. Et au vu des commentaires tres agressifs que j’ai pu trouver de ci delà, cette jeune femme a fait de l’internet mondial un gigantesque espace de défouloir personnel.
Malheureusement, de tel mails tu en recevras certainement d’autres. Une m’a harcelé pendant un sacré moment et mon bon coeur me disait de laisser faire que certainement c’était une fille paumée qui pour X raisons m’avait choisit comme tête de turc. Sauf qu’à un moment c’est devenu des menaces, là je me suis vraiment fâchée et j’ai cherché et trouvé, comme toi, qui c’était. Encore pareil, rien dans ses discours ne collaient avec sa réalité. Tout ça pour dire à toutes celles ou ceux qui sous couvert d’anonymat abreuvent les uns et les autres d’insultes, que cela peut être jouissif un moment mais que cela peut aussi se retourner contre vous. Mais il m’est aussi arrivé que des anonymes soient des victimes qui appelaient à l’aide, c’est un moyen souvent utilisé. Une victime d’agression perd la plupart du temps la confiance ou n’ose avouer son drame. S’adresser anonymement à quelqu’un, choisi au hasard, peut lui permettre de parler et de la soulager d’un sacré poids.
Oulà, j’en ai reçu d’autres. J’avais un spécialiste des mails de menace (qui bosse à radio France) qui terminait ts ses mails par la mention « Ce mail est PRIVE, toute diffusion de son contenu ou partie de son contenu constituera un grave délit pour lequel je demanderai poursuites et dédomagements. »
C’est pas joli ça ?
Sinon, pr les appels à l’aide, je comprend ce dont tu parles ca fait bientôt 3 ans que je le fais sur mon billet « la cocaine sera le poison de l’homme blanc »
J’ai envoyé un paxon de monde à Marmottan 😉
Ca démontre que toutes les couches sociales sont touchées par ce phénomène pas très honorable…